En Tunisie, la démission du chef du gouvernement renforce la crise politique

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Elyes Fakhfakh, alors premier ministre, devant le Parlement à Tunis, le 25 juin.

Le chef du gouvernement tunisien, Elyes Fakhfakh, a présenté sa démission, mercredi 15 juillet, à la demande du président Kaïs Saïed. Son équipe n’aura eu les commandes que cinq mois, autant qu’il en avait fallu pour la constituer après les élections législatives d’octobre 2019. Ce social-démocrate de 47 ans aura ainsi effectué l’un des mandats les plus courts depuis la révolution de 2011.

La requête de Kaïs Saïed ne tient pas d’un désaveu vis-à-vis d’un chef de gouvernement qu’il avait lui-même choisi. Pour le chef de l’Etat, il s’agit surtout de prendre de court le parti islamo-conservateur Ennahda dont certains élus avaient initié une motion de censure contre Elyes Fakhfakh. Si celle-ci avait été adoptée, c’est le parti dirigé par Rached Ghannouchi, actuellement président du Parlement, qui se serait arrogé le droit de nommer son successeur. Kaïs Saïed conserve donc cette prérogative.

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Ennahda, qui comptait jusqu’alors six ministres au gouvernement, était en froid avec M. Fakhfakh et se préparait à dégainer une coalition alternative pour le destituer. Pour justifier son offensive, le parti d’inspiration islamiste avait mis en avant des soupçons de conflit d’intérêts pesant sur le chef du gouvernement. Cet ancien cadre de Total se voyait reprocher d’avoir pris ses fonctions tout en possédant des parts dans des entreprises ayant décroché des contrats publics. Une enquête a été ouverte dont les résultats sont attendus dans les prochains jours.

Mais pour faire adopter sa motion de censure, Ennahda comptait sur des formations politiques elles-mêmes imprévisibles et controversées. Son premier soutien est ainsi le parti Qalb Tounes, dirigé par Nabil Karoui, fondateur de la chaîne de télévision Nessma et actuellement poursuivi pour blanchiment d’argent et évasion fiscale. Ce parti a perdu un tiers de ses élus quelques mois après les élections. Ennahda est aussi suivi par la Coalition de la dignité, une formation conduite par Seiffedine Makhfalouf, un avocat qui s’est fait connaître en défendant des commanditaires d’attentats et en multipliant les sorties polémiques. Avec cette stratégie, Ennahda s’est isolé des autres courants politiques.

Soubresauts politiques

La coalition sortante, composée du parti islamo-conservateur et d’autres formations regroupant des sociaux-démocrates, des nationalistes arabes ou des centristes, était fragile dès sa constitution. « Nous ne sommes pas entrés dans ce gouvernement de gaieté de cœur », confirme Oussema Sghaïer, un élu d’Ennahda.

Arrivé en tête des élections de 2019, mais avec à peine un cinquième des sièges, le parti avait échoué à réunir une majorité autour du chef de gouvernement de son choix, Habib Jomli, après des mois de négociations ardues. Une impasse qui avait laissé le champ libre à Kaïs Saïed pour s’impliquer dans le processus gouvernemental et proposer le nom de M. Fakhfakh.

Lire aussi Tunisie : le gouvernement de Habib Jemli rejeté par le Parlement

Pour Hichem Ajbouni, du Courant démocrate, un parti qui s’est fait connaître par son combat contre la corruption, « Ennahdha avait l’intention de faire tomber ce gouvernement dès le jour où il a pris ses fonctions ». N’ayant pas pu « placer ses hommes ni négocier les nominations de gouverneurs ou de dirigeants d’institutions publiques », le mouvement a tout fait pour achever cette équipe, estime M. Ajbouni.

Ces soubresauts politiques paralysent l’Assemblée des représentants du peuple dont les séances sont désormais suspendues. Des emprunts pour des projets publics aux réformes institutionnelles, plus rien n’avance.

Perspectives économiques plus que moroses

Pourtant, la Tunisie est sur le fil du rasoir. Si elle s’est tirée sans trop de dommages sanitaires de l’épidémie due au coronavirus, avec seulement 50 décès recensés, les perspectives économiques sont plus que moroses. Le produit intérieur brut devrait chuter de 6 % en 2020, l’endettement se creuse dangereusement tandis que le secteur du tourisme – une source cruciale d’emplois et de devises étrangères – est quasiment au point mort.

Au plan sécuritaire, le conflit qui oppose les puissances étrangères en Libye, aux frontières de la Tunisie, maintient le territoire sous tension permanente. L’instabilité politique pourrait fragiliser la gestion de ces crises.

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Des négociations épineuses vont désormais débuter pour former un nouveau gouvernement, un processus dans lequel Kaïs Saïed jouera à nouveau un rôle de premier plan. M. Fakhfakh va continuer à gouverner en attendant la nomination de son successeur.

Preuve de la volatilité de la situation, les six ministres qu’Ennahda comptait au gouvernement, dont celui de la santé Abdellatif Mekki, l’un des hommes orchestres de la lutte contre le Covid-19, ont été limogés mercredi soir. Et plusieurs formations politiques qui siégeaient avec Ennahda au conseil des ministres ont commencé à s’associer pour retirer la confiance au président de l’Assemblée Rached Ghannouchi.

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