« A Kaboul, nous refusons qu’un massacre dans une maternité soit un risque ordinaire »

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Tribune. Le 12 mai 2020, vers 10 h 00 du matin, la maternité du quartier de Dasht-e-Barchi à Kaboul que Médecins sans frontières (MSF) avait ouverte en 2014 a été attaquée: les assaillants ont assassiné dans leurs lits, chambre après chambre, seize mères en couche dont cinq étaient sur le point de mettre leur bébé au monde. Neuf autres personnes ont été tuées, dont une sage-femme employée par MSF et deux enfants de 7 et 8 ans qui venaient ce jour-là se faire vacciner à l’hôpital abritant la maternité.

Ce massacre ignoble n’a pas été revendiqué. Le gouvernement afghan a immédiatement accusé les talibans ; les talibans ont démenti ; les Etats-Unis ont accusé l’organisation de l’Etat islamique. Les assaillants auraient été tués lors de l’assaut des forces armées afghanes et étrangères pendant que plus d’une centaine d’employés MSF et de mères se terraient, terrifiés, dans des pièces sécurisées au sein de l’hôpital. Aucune enquête officielle n’a amené d’éléments factuels permettant de désigner les responsables.

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Un mois après, nous ne savons donc presque rien mais nous en savons assez: la cible des meurtriers était les femmes Hazara de Dasht-e-Barchi et leurs soignants. Et il ne s’agit pas d’un tragique fait divers : cette attaque s’inscrit dans une suite d’attaques contre la minorité chiite Hazara [environ 30% de la population afghane], contre les civils et contre les organisations humanitaires. Elle s’inscrit aussi dans une suite d’attaques contre le personnel et les patients MSF dont plus de soixante dix sont ainsi morts depuis 2004.

De nombreux actes terroristes depuis 2004

En juin 2004, cinq employés – dont deux Afghans et trois internationaux – étaient tués dans la province de Badghis. Ce quintuple assassinat, vraisemblablement commis par un chef de police local, ne fit jamais l’objet d’une véritable enquête de la part des autorités afghanes et resta impuni. Il entraîna le départ de MSF d’Afghanistan, pour cinq ans. Nous y revenions en 2009, convaincus que nous pouvions négocier un espace d’intervention avec le gouvernement et avec les talibans, qui avaient cessé de nous désigner comme des cibles légitimes.

En octobre 2015, ce fut un avion de l’armée américaine qui bombarda l’hôpital MSF de Kunduz sans répit, pendant une heure. Cette attaque causa la mort de 38 personnes, dont 24 patients et 14 membres du personnel MSF ; elle fit également 37 blessés. Nous retournions à Kunduz en 2017, après avoir reçu l’assurance de l’ensemble des groupes armés avec lesquels nous étions en contact que nous pouvions reprendre nos activités de soignants humanitaires.

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