« Un grand emprunt européen au parfum fédéraliste »

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Tribune. « Rien n’arrête une idée dont le temps est venu », prévenait Victor Hugo. L’idée de permettre à l’Union européenne (UE) de s’endetter à la place des Etats, pour répondre à leurs nouveaux et pressants défis, voit son heure arriver. Ursula von der Leyen, la présidente de la Comission européenne, a mis sur la table une ambitieuse proposition, celle d’un grand emprunt européen levé sur les marchés au nom des Vingt-Sept pour financer les dépenses des Etats qui doivent remuscler et verdir leurs économies. Pour rembourser plus tard cet emprunt, la Commission suggère plusieurs projets de taxation qui attribueraient à l’UE de nouvelles recettes propres, c’est-à-dire indépendantes des contributions des Etats.

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L’ensemble répand un parfum fédéraliste, qui conduit même les plus européistes à évoquer un « moment hamiltonien » de la construction européenne, en référence au constitutionnaliste américain Alexander Hamilton, qui organisa, en 1790, la première mutualisation des dettes entre Etats fédérés. Mais nous ne faisons pas les « Etats-Unis d’Europe », n’en déplaise au grand Hugo qui forgea l’expression. Le compromis qui sortira des dures négociations lancées par le sommet européen du 19 juin n’aura pas la radicalité des projets fédéralistes ni l’ampleur d’un stabilisateur automatique qu’enseigne la théorie économique. Les négociations impliqueront 27 exécutifs, puis 27 parlements nationaux (sans compter les assemblées régionales) pour la ratification, ainsi que le Parlement européen. Autant de lieux de décisions qui peuvent transformer la négociation en embrouillamini, au risque d’édulcorer l’idée initiale.

La conjoncture politique présente toutefois quelques solides éléments porteurs pour soutenir l’élan. Tout d’abord, une impulsion franco-allemande cette fois profonde. L’acceptation par Berlin, d’une part que l’Union s’endette pour les Vingt-Sept, d’autre part que l’argent ainsi levé soit pour l’essentiel transféré et non prêté aux Etats, témoigne de la mue opérée outre-Rhin. Celle-ci n’est pas le seul fait d’une chancelière retrouvant de l’ascendant, mais s’appuie sur une révision par l’Allemagne de l’appréciation de ses intérêts, qui recoupent davantage les vues françaises. L’amorce franco-allemande du 18 mai a soutenu l’initiative de la Commission et doit désormais, à la faveur de la présidence allemande du Conseil de l’UE à venir, servir d’aiguillon aux Etats membres.

Ménager le langage

Ceux-ci, fait notable de cette négociation, ne comptent plus le Royaume-Uni, c’est-à-dire un élément perturbateur de poids. A sa place, quatre Etats dits « frugaux » (Autriche, Danemark, Pays-Bas, Suède) ont montré, lors de négociations budgétaires pré-Covid-19, leur pouvoir de blocage et une détermination alors sous-estimée. Mais ce pôle est désormais privé du soutien primordial de Berlin. Et tous ont besoin, pour leurs exportations, d’économies européennes rétablies. Politiquement, ils ont chacun une longue culture du compromis. Ils auront sans doute matière à se diviser et aucun ne peut superbement s’isoler. Ils ne pourront pas non plus se tourner vers le Parlement européen qui, autre élément remarquable, comprend une majorité résolue à doter l’Union d’une capacité de relance massive. Des concessions, des aménagements seront à trouver pour finalement satisfaire l’un ou l’autre des « frugaux », mais leur capital politique reste insuffisant pour évacuer l’idée d’une solidarité budgétaire européenne conséquente.

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