Au Cameroun, trois militaires inculpés pour le massacre de Ngarbuh

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Des militaires camerounais patrouillent à Bafut, dans la région du Nord-Ouest, en novembre 2017.

Trois militaires ont été inculpés de l’« assassinat » de civils, dont dix enfants, en février dans la partie anglophone du Cameroun. Ce massacre avait déclenché un tollé international, contraignant le pouvoir à admettre la responsabilité de ses soldats, longtemps niée.

Depuis près de trois ans, des groupes séparatistes et l’armée s’affrontent dans les régions camerounaises du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, où vit l’essentiel de la minorité anglophone, dont une partie s’estime marginalisée par la majorité francophone du pays. Les combats, mais aussi les exactions et meurtres de civils par les deux camps, selon de nombreuses ONG, ont fait plus de 3 000 morts et forcé plus de 700 000 personnes à fuir leur domicile.

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L’armée avait initialement parlé d’un « malheureux accident », avant que Yaoundé n’admette mi-avril que dix enfants et trois femmes avaient été tués le 14 février par des militaires épaulés par une milice de l’ethnie peule dans le quartier de Ngarbuh du village de Ntumbaw, dans la région du Nord-Ouest. Pour l’ONU, au moins 23 civils, dont quinze enfants (neuf de moins de 5 ans) et deux femmes enceintes, avaient été tués. Ce drame a ému nombre de Camerounais. Le célèbre bassiste Richard Bona a même rendu hommage aux victimes dans une chanson intitulée Ngarbuh.

Les trois soldats camerounais, arrêtés mi-avril, « ont été inculpés » notamment d’« assassinat », a déclaré à l’AFP le porte-parole de l’armée, le colonel Cyrille Atonfack Guemo, jeudi 11 juin. Deux mois durant, Yaoundé avait nié la tuerie, affirmant que cinq civils avaient péri à la suite de l’explosion de conteneurs de carburant consécutive à des échanges de tirs entre des soldats et des « terroristes » séparatistes.

La « pression » d’Emmanuel Macron

Le massacre avait provoqué un tollé international et notamment l’intervention de la France, alliée de Yaoundé et ancienne puissance coloniale : le président Emmanuel Macron avait dénoncé « des violences intolérables » et promis de « mettre le maximum de pression » sur le chef de l’Etat, Paul Biya, au pouvoir depuis trente-sept ans, lequel avait ordonné une enquête.

Mi-avril, la présidence reconnaissait enfin que trois militaires « incontrôlés », désobéissant aux ordres, avaient tué, avec l’aide de supplétifs, dix enfants et trois femmes, puis « tenté de masquer les faits par des incendies » avant de falsifier leurs rapports. Ces deux soldats du rang et un sergent ont également été inculpés pour « violation de consignes » et « destruction et incendie », a précisé jeudi le porte-parole de l’armée.

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« Nous nous félicitons de l’ouverture de cette enquête », a réagi jeudi Ilaria Allegrozzi, chercheuse de l’ONG Human Rights Watch (HRW) pour le Cameroun : « Cependant, nous pensons que tous les responsables de ces crimes odieux, y compris ceux qui se trouvent plus haut dans la chaîne de commandement, devraient être tenus responsables et punis de manière appropriée. » Selon HRW, citant des témoins, entre dix et quinze militaires ont participé au massacre, notamment des éléments de l’unité d’élite du Bataillon d’intervention rapide (BIR).

« Nous ne sommes pas satisfaits », renchérit Maximilienne Ngo Mbe, directrice du Réseau des défenseurs des droits humains en Afrique centrale (Redhac) : « Il faut que les commanditaires de ce massacre soient entendus et traduits à la barre, aucun haut gradé de l’armée n’a été cité et tant que les commanditaires ne sont pas inquiétés, l’impunité dans l’armée va se poursuivre. »

Mort d’un journaliste en prison

Les accusations d’exactions par l’armée se multiplient ces dernières années. Début juin, également sous la pression des ONG, elle a reconnu la mort en détention de Samuel Wazizi, un journaliste anglophone arrêté dix mois auparavant, assurant qu’il avait été emporté par une septicémie deux semaines après son interpellation et l’accusant de travailler pour les séparatistes. Des syndicats de journalistes camerounais, eux, affirment qu’il a succombé à des tortures.

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Il y a onze mois s’est ouvert à Yaoundé le procès de sept militaires accusés d’avoir exécuté en 2015 deux femmes et leurs deux bébés dans le nord du pays, en proie à de nombreuses attaques djihadistes. Mais l’audience est sans cesse ajournée depuis. A l’époque de ces assassinats, révélés par une vidéo, le gouvernement avait parlé de « fake news » et d’« horrible trucage », avant de se rétracter et d’arrêter les sept militaires.

Le Monde avec AFP

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