Libérer Schengen, pour rétablir la liberté de ciculer en Europe

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Au col d’Ibardin (Pyrénées-Atlantiques), point de passage entre la France et l’Espagne, le 18 mai. Il est fermé depuis mi mars.  Le côté droit de la chaussée et français, le gauche espagnol. Il est interdit de traverser la route.
Au col d’Ibardin (Pyrénées-Atlantiques), point de passage entre la France et l’Espagne, le 18 mai. Il est fermé depuis mi mars.  Le côté droit de la chaussée et français, le gauche espagnol. Il est interdit de traverser la route. AXELLE DE RUSSE POUR LE MONDE

Editorial du « Monde ». Abattre les frontières au sein de ce qui est devenu, en 1995, l’espace Schengen et regroupe aujourd’hui vingt-six Etats de l’Union européenne, a pris plusieurs années. Les rétablir, unilatéralement et dans le plus grand désordre lorsque le Covid-19 s’est attaqué à l’Europe, n’a pris que quelques jours. Les ouvrir à nouveau s’avère d’une grande complexité ; c’est cependant un défi que les Etats européens se doivent de relever le plus rapidement possible, et de manière coordonnée.

Avec le marché unique, l’espace Schengen, qui consacre la liberté de circulation des biens et des personnes, est la réalisation la plus visible de l’intégration européenne. Les deux ont été mis à mal pendant la phase la plus aiguë de la pandémie ; mais, si le marché unique a recouvré son intégrité, l’espace Schengen, lui, est toujours entravé par de multiples restrictions.

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L’article 28 du code Schengen autorise les Etats membres à fermer leurs frontières en cas de « menace grave », après en avoir notifié la Commission. La liberté de circulation avait déjà été sérieusement malmenée pendant la crise migratoire, en 2015 et 2016. Le coronavirus a, lui, carrément semé le chaos, suscitant un réflexe quasi naturel parmi de nombreux gouvernements, celui de mettre leur population à l’abri derrière les frontières nationales.

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Certains ont pris la peine de notifier leur décision, d’autres ne l’ont fait qu’a posteriori. L’improvisation a souvent prévalu, même à Berlin : le 11 mars, la chancelière Merkel affirmait que la fermeture des frontières « n’était pas la réponse adéquate » ; quatre jours plus tard, l’Allemagne fermait ses frontières avec la France, le Luxembourg, l’Autriche, la Suisse et le Danemark. D’autres pays qui, comme la France, n’ont pas fermé leurs frontières ont instauré des contrôles sanitaires ou des restrictions de passage.

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Le retour au régime Schengen est laborieux. Si des accords ont été assez rapidement trouvés pour permettre aux travailleurs frontaliers de passer d’un pays à l’autre quotidiennement, la diversité des situations sanitaires selon les pays incite plusieurs gouvernements à maintenir les restrictions à la liberté de circuler. Critiquée pour sa lenteur, la Commission a tenté de coordonner l’assouplissement des contrôles avec des « lignes directrices ».

Un rétablissement crucial

Mais pour l’heure, l’essentiel de ces questions se règle entre Etats sur la base de négociations bilatérales. L’Estonie, la Lettonie et la Lituanie viennent de créer une « bulle balte », espace commun au sein duquel la circulation est libre ; cette initiative présente un risque de fragmentation de l’espace Schengen, de même que les tentatives de certains pays, comme la Croatie ou l’Autriche, de conclure des accords spécifiques avec les pays dont ils souhaitent accueillir les touristes.

La Commission a réussi à harmoniser les positions des Etats membres sur la fermeture des frontières extérieures de l’Union, pour raisons sanitaires, jusqu’au 15 juin. Certains pays, dont la France, souhaitent que les frontières intérieures soient également ouvertes à cette date. A moins d’une résurgence de l’épidémie dans la phase actuelle de déconfinement, il est important que la Commission et les Etats membres parviennent à tenir cet objectif. Le rétablissement de la liberté de circuler est crucial pour le bien-être des Européens, pour la reprise du tourisme, secteur vital de l’économie dans de nombreux pays – et pour prouver que l’Europe existe encore.

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Le Monde

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