Frontières ouvertes ou fermées ? Comment s’y retrouver dans le grand flou européen

0
100

[ad_1]

Des policiers espagnols contrôlent des journaliers roumains travaillant en France alors qu’ils essayent de rentrer chez eux en Espagne, à Irun, de l’autre côté du Puente Santiago.
Des policiers espagnols contrôlent des journaliers roumains travaillant en France alors qu’ils essayent de rentrer chez eux en Espagne, à Irun, de l’autre côté du Puente Santiago. Axelle de Russé pour “Le Monde”

En quelques jours, mi-mars, la liberté de circulation en Europe, principe fondateur de l’espace Schengen, s’est envolée. Les Etats ont fermé leurs frontières plus rapidement qu’ils confinaient leur population, et les frontières extérieures de l’Union européenne (UE) se sont closes aussi vite. S’il ne s’agit pas, sur le plan juridique, d’une fermeture totale, le rétablissement temporaire des contrôles sur le continent s’en rapproche.

Alors que les mesures de confinement sont peu à peu levées, les Etats tentent désormais de rouvrir leurs frontières pour des raisons essentiellement économiques, le tourisme représentant 10 % du PIB et 12 % des emplois européens. Malgré les appels de la Commission européenne à coordonner le mouvement, la fin des restrictions de déplacement se fait en ordre dispersé et dans une certaine cacophonie.

  • Les frontières extérieures de l’Europe fermées

Les frontières extérieures de l’UE sont fermées aux extra-communautaires depuis le 17 mars, et elles le resteront, « sauf pour les Français qui reviennent », a précisé, mardi 19 mai sur LCI, le ministre des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian. Cette situation va encore durer « plusieurs semaines », voire « plusieurs mois », avait indiqué, le 6 mai, Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Cette mesure – qui comprend quelques exceptions – a été recommandée par la Commission européenne, qui n’a pas de pouvoir direct sur les contrôles aux frontières. Le 8 mai, elle a renouvelé aux Etats membres son « invitation » à prolonger jusqu’au 15 juin « l’application de la restriction concernant les déplacements non essentiels en provenance de pays tiers » à la zone « EU + », qui inclut les 27 (à l’exception de l’Irlande) et les quatre pays « associés » à l’espace Schengen (Islande, Liechtenstein, Norvège, Suisse).

  • Les Européens peuvent-ils voyager hors d’Europe ?

La situation varie selon les pays de destination. Les Etats-Unis interdisent ainsi l’entrée sur leur territoire aux étrangers venus d’Europe – et c’est le cas dans la plus grande partie du globe. Selon M. Le Drian, le Canada, le Brésil, l’Argentine, l’Afrique du Sud, le Kenya, la Côte d’Ivoire, la Tunisie, Israël et les territoires palestiniens, la Russie, le Japon, la Thaïlande, l’Indonésie, l’Australie ou encore la Nouvelle-Zélande, pour ne citer qu’eux, n’autorisent pas les Français à accéder à leur territoire, à l’exception de quelques rares cas.

D’autres pays, note le Quai d’Orsay, n’ont pas explicitement fermé leurs frontières, mais ont interrompu toutes les liaisons internationales. C’est notamment le cas de l’Inde, de l’Algérie ou du Maroc. La Chine a rouvert la délivrance de visas, mais les vols vers le pays restent limités. L’ensemble de ces informations sont disponibles, pays par pays, sur le site Internet du ministère des affaires étrangères, dans la rubrique « conseils aux voyageurs ».

  • Circuler en Europe : vers un assouplissement progressif

Les ventas de Biriatu, en Espagne, sont fermées. En temps normal, 90 % des clients de ces boutiques transfrontalières sont français. Aujourd’hui, les rideaux sont baissés, les parkings vides.
Les ventas de Biriatu, en Espagne, sont fermées. En temps normal, 90 % des clients de ces boutiques transfrontalières sont français. Aujourd’hui, les rideaux sont baissés, les parkings vides. Axelle de Russé pour “Le Monde”

Entre les Etats européens et jusqu’à la mi-juin, le passage des frontières intra-européennes est réservé aux déplacements essentiels. « Ce n’est pas une fermeture des frontières, mais un rétablissement des contrôles et de la discrétion bureaucratique », explique Virginie Guiraudon, directrice de recherche au CNRS et professeure à Sciences Po, spécialiste de l’immigration en Europe.

Chaque Etat décidant des règles à appliquer, il est très difficile de s’y retrouver, tant les décisions de chaque pays évoluent de jour en jour.

La situation en France. Si les frontières nationales (intra-européennes) ne sont pas totalement « fermées », des « contrôles et restrictions » sont bien en place, précise au Monde le ministère de l’intérieur. Aux frontières terrestres, relève par exemple la préfecture des Hauts-de-France à propos de la Belgique, « des contrôles à la frontière sont organisés de manière quotidienne ». « A la frontière franco-italienne, les contrôles sont rétablis depuis cinq ans », remarque cependant Virginie Guiraudon : en 2015, la France avait en effet rétabli les contrôles en raison de la menace terroriste et n’a cessé de renouveler cette mesure depuis.

Sont pour l’instant autorisés à rentrer en France les Européens qui y résident, les travailleurs frontaliers, les transporteurs de marchandises, les soignants qui concourent à la lutte contre le Covid-19 ainsi que les membres de familles vivant de part et d’autre d’une frontière.

En fonction de l’évolution de la situation sanitaire, « les exceptions pourront être étendues dans les prochains jours à d’autres catégories de personnes, notamment les travailleurs saisonniers agricoles ressortissants de l’UE », précise le ministère de l’intérieur. Jusqu’au 15 juin, une certitude : les touristes étrangers n’ont pas le droit d’entrer en France.

La situation en Europe. C’est une scène que l’on croyait appartenir au passé : des files de voitures à des postes-frontières entre pays européens. « A la frontière germano-polonaise, il y a des heures de queue », remarque Virginie Guiraudon. La situation est inédite depuis la création de l’espace Schengen.

Et si quelques pays lèvent progressivement les limitations, cela se fait sans coordination. Le 5 mai, l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie ont ainsi rouvert sans limitation leurs frontières communes, créant une forme de bulle de libre circulation au sein des pays baltes.

D’autres pays ont déjà assoupli les règles pour accueillir des travailleurs agricoles saisonniers, essentiellement venus d’Europe de l’Est. Une exploitation agricole britannique a même affrété un avion pour faire venir environ 180 Polonais en Angleterre, et ce « en dehors de tous les canaux officiels », selon l’ambassadeur de Pologne au Royaume-Uni.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Coronavirus : en Europe, le casse-tête de la réouverture des frontières

Les évolutions attendues. Ce vaste flou au sein de l’espace Schengen devrait être réglé d’ici à la mi-juin, espèrent les différentes capitales européennes. « Je pense que progressivement, à partir du 15 juin, on pourra aboutir à un assouplissement généralisé », a indiqué le chef de la diplomatie française mardi. Mais pour l’instant, il s’agit essentiellement de discussions bilatérales, relève Virginie Guiraudon : « Ce n’est pas encore réglé ! »

Par exemple, Paris et Berlin sont convenus de « faciliter le quotidien des frontaliers » en s’accordant d’ici au 15 juin sur « le principe de poursuivre l’ouverture coordonnée et progressive des points de passage à la frontière ». Mais, sans attendre une échéance partagée au niveau européen, le gouvernement italien a annoncé la réouverture à partir du 3 juin de ses frontières aux touristes de l’UE. Une accélération perçue comme nécessaire pour relancer l’économie du pays, mais qui reste pour l’heure un cas isolé en Europe.

Tribune : « Sauver la saison touristique européenne »

C’est contre cette levée des barrières en ordre dispersé que la Commission européenne a appelé, le 13 mai, les Etats à une réouverture des frontières intérieures de l’UE de façon « concertée » et « non discriminatoire ». « Il est essentiel que nous puissions avoir des décisions coordonnées au niveau européen surtout sur l’infra-Schengen. Ce n’est pas le cas aujourd’hui », a également regretté samedi le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Tourisme et coronavirus : la Commission européenne essaie de cadrer la saison estivale
  • Quatorzaine : « Chacun fait ce qu’il veut »

La situation en France. En règle générale, les ressortissants européens qui peuvent entrer en France ne sont pas soumis à une période d’isolement de 14 jours. En revanche, à partir du 20 mai, les Français qui rentrent en France depuis l’extérieur de l’UE seront appelés à « se soumettre volontairement à une quatorzaine », a déclaré mardi le ministre des affaires étrangères. Cette « initiative autonome » se fera « sur la base de la responsabilité personnelle, et cette quatorzaine pourra s’effectuer au domicile ou dans le lieu choisi » par le voyageur.

Signe de la cacophonie ambiante – et en réponse à l’Espagne qui a décidé le 12 mai d’imposer des mesures de quatorzaine à tous ceux qui arrivaient sur son sol – la France a cependant annoncé, « selon un principe de réciprocité », l’application de la même mesure « lorsque la réglementation sera finalisée », précise au Monde le ministère de l’intérieur, qui ajoute qu’il en va de même pour les personnes arrivant du Royaume-Uni.

Ailleurs en Europe. « Chacun fait ce qu’il veut », résume Virginie Guiraudon. Différents pays ont ainsi établi des mesures de quarantaine comme l’Espagne donc, l’Italie, la Pologne, la Slovaquie, l’Autriche ou encore la République tchèque, avec à chaque fois des dispositions spécifiques. Le Royaume-Uni entend lui instaurer une quarantaine « pour les personnes qui entrent en avion » dans le pays, mais aucune précision n’a pour l’instant été donnée. Le Quai d’Orsay recense ces mesures dans sa rubrique « conseils aux voyageurs ».

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le Royaume-Uni envisage des mises en quarantaine pour les arrivées en avion

[ad_2]

Source link

Have something to say? Leave a comment: