« Sur l’euro, les Allemands sont schizophrènes »

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Le président de la Cour constitutionnelle allemande, Andreas Vosskuhle, à Karlsruhe, le 5 mai.
Le président de la Cour constitutionnelle allemande, Andreas Vosskuhle, à Karlsruhe, le 5 mai. SEBASTIAN GOLLNOW / AFP

Frederik Ducrozet est économiste à la banque privée Pictet. Il est l’un des meilleurs spécialistes de la Banque centrale européenne (BCE), qu’il suit depuis plus d’une décennie.

Comment réagissez-vous à la décision de la Cour constitutionnelle allemande ?

On a affaire à huit juges, dont cinq sont connus pour leurs opinions très négatives contre la politique d’achat de titres, le QE [Quantitative Easing, ou assouplissement quantitatif] menée par Mario Draghi [président de la Banque centrale européenne de 2011 à 2019]. Est-ce qu’une banque centrale se permettrait de donner un avis sur le travail d’une cour constitutionnelle ? Jamais. De même, la Banque centrale européenne est indépendante et n’a d’ordres à recevoir de personne. Il n’y a pas de base légale sur laquelle s’appuie ce jugement. Il n’est pas possible à une cour nationale d’ordonner l’action de la BCE.

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La Cour constitutionnelle allemande n’a-t-elle cependant pas de pouvoirs sur la Bundesbank, qui effectue une partie des achats de titres pour le compte de la BCE ?

Il y a effectivement une ambiguïté à ce niveau-là. Je me rassure cependant en voyant la réaction de Jens Weidmann [le patron de la Bundesbank], qui a affirmé qu’il irait expliquer l’action de la BCE à la Cour constitutionnelle. En clair, il soutient la BCE et l’aidera. Si Weidmann a toujours critiqué la politique de QE, il n’a d’ailleurs jamais dit qu’elle était illégale.

Etes-vous inquiet après cette décision ?

Oui, je le suis, parce que c’est un problème politique. L’Allemagne est le pays qui a le plus poussé à l’indépendance de la BCE. Aujourd’hui, c’est elle qui cherche à empiéter dessus. Les Allemands sont schizophrènes sur l’euro. On ne peut pas à la fois vouloir être dans l’euro, refuser la mutualisation des dettes et être contre l’intervention de la BCE.

J’espère qu’Emmanuel Macron ou Angela Merkel comprennent la gravité de ce qui se passe. Si les Etats ne prennent pas des mesures pour soulager la BCE, en mutualisant les dettes d’une façon ou d’une autre, le problème ne sera pas résolu. Cela est nécessaire pour éviter le retour d’une crise financière. Les enjeux sont très importants.

La BCE risque-t-elle d’être immobilisée avec cette décision de la Cour constitutionnelle allemande ?

Pas à court terme, ni même d’ici douze ou dix-huit mois. Le jugement concerne le PSPP [Public Sector Purchase Programme], qui est le programme d’achat de dettes lancé en 2015. Depuis mars, ce qui compte vraiment sur les marchés est le PEPP [Pandemic Emergency Purchase Programme, programme pandémie de 750 milliards d’euros], qui est séparé. La cour de Karlsruhe l’exclut explicitement de son jugement. Le problème concerne le long terme.

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