Alaa Salah, la révolution en chantant

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Genève, mars 2020. Alaa Salah Ali Taha, Militante, figure de la Révolution soudanaise. Une version édulcorée du FIFDH ( Festival International des Droits Humains) s’est tenue à Genève à cause du Corona virus. Avec la participation de Alaa Salah, cette jeune étudiante de Khartoum qui est devenue une icône de la révolution soudanaise grâce à la mobilisation populaire et une image devenue symbole. © Olivier Vogelsang

OLIVIER VOGELSANG POUR « LE MONDE »

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Publié aujourd’hui à 01h39

Pour une icône, elle bouge vraiment beaucoup. Alaa Salah parle avec ses mains, et quand celles-ci se reposent un peu, c’est son visage qui prend le relais. Et même quand le visage se fige, les yeux pétillent, furètent, toujours aux aguets. Alaa Salah a la bougeotte, mais une bougeotte un peu lente et très gracieuse, toujours animée par une onde invisible et harmonieuse. Elle a beau être une égérie, elle ne sera pas la Joconde de la révolution soudanaise, plutôt sa Beyoncé, une jeune femme bien de son temps.

C’était il y a un an, au paroxysme du soulèvement. Une foule de plusieurs dizaines puis de centaines de milliers de personnes avait envahi, depuis le 6 avril, le quartier général des forces armées, Al-Qiyadah, en plein centre de la capitale, Khartoum, pour demander le départ d’Omar Al-Bachir, le général et dictateur à la tête du pays depuis son coup d’Etat de 1989. Trente ans de règne durant lequel l’islamisme pur et dur des débuts a cédé la place à un islamisme de prédation, toujours dominé par le kaki des treillis.

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La révolution a débuté le 19 décembre 2018 à Atbara, dans le nord du pays, après l’annonce du triplement du prix du pain. Elle a vite embrasé tout le territoire et les revendications ont fini par se réduire à un seul slogan : « Tesgot bass ! » (« Casse-toi, point »), destiné à Omar Al-Bachir. « Les premiers jours, je cachais à mes parents que je manifestais, raconte Alaa Salah rencontrée lors du 18e Festival du film et du forum international sur les droits humains, dont elle était l’une des invitées d’honneur, en mars, à Genève. Quand ils ont voulu m’interdire de sortir, je les ai convaincus qu’on ne pouvait pas rester là sans rien faire, que nous étions des morts-vivants. Alors autant mourir pour quelque chose. »

Dignité, combativité et coquetterie

Malgré les couvre-feux, l’état d’urgence, la censure d’Internet, la répression et la torture, le mouvement n’a jamais cessé jusqu’au sit-in d’Al-Qiyadah, qui lui a donné un nouvel élan. Alaa Salah, 22 ans tout juste à l’époque, s’y est rendue tous les jours, habillée de blanc, une tenue réservée aux femmes respectables et une référence à la révolution de 1964, qui avait chassé le général Ibrahim Abboud. Le 8 avril, elle avait ajouté une paire de boucles d’oreilles dorées. « J’étais loin de me douter de ce qui allait se passer, se souvient-elle. Ce n’était pas la première fois que je le chantais en public. J’aime bien mettre l’ambiance, j’ai un côté boute-en-train. »

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