Endoctrinés, des adolescents yézidis kidnappés par l’EI quittent le « califat » à contrecœur

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Pris en otage en 2014, ils se sont vu inculquer la haine de leur terre – le Sinjar –, de leur religion – le yézidisme – et de leur langue – le kurde. A tel point que certains auraient été prêts à « combattre jusqu’à la mort » avec les djihadistes.

Par Hélène Sallon Publié aujourd’hui à 11h26, mis à jour à 11h26

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Maison de Mahmoud, père de famille de yézidis syrien qui accueille d’autres yézidis, parmi lesquels des femmes et des enfants, sortis de l’EI, le temps qu’ils se rétablissent avant d’être ramenés au Sinjar (Kurdistan irakien). Province d’Hassaké, Syrie, le 5 mars 2019.
Maison de Mahmoud, père de famille de yézidis syrien qui accueille d’autres yézidis, parmi lesquels des femmes et des enfants, sortis de l’EI, le temps qu’ils se rétablissent avant d’être ramenés au Sinjar (Kurdistan irakien). Province d’Hassaké, Syrie, le 5 mars 2019. LAURENCE GEAI POUR “LE MONDE”

Sur des matelas disposés au sol, trois enfants jouent à des jeux vidéo sur un téléphone. Trois femmes assises contre la fenêtre, sous une broderie chatoyante de l’ange-paon yézidi, font répéter à un adolescent des phrases en kurde.

Assis seul à l’écart, la jambe gauche affublée d’une broche externe, Ayman Farhan Amek, la tête emmitouflée dans un foulard marron, reste sans rien faire. Issu de la communauté religieuse kurdophone des yézidis, le jeune homme de 16 ans, originaire de Kocho, dans le Sinjar irakien (l’Irak compte entre 100 000 et 600 000 yézidis, selon les estimations), est sorti fin février de Baghouz, le dernier réduit du « califat » de l’organisation Etat islamique (EI), qui résiste encore face à l’offensive des Forces démocratiques syriennes (FDS), soutenues par la coalition internationale. « Si je n’étais pas blessé, je retournerais là-bas pour me battre jusqu’à la mort », avoue Ayman Farhan Amek, qui a, pendant cinq ans, été l’esclave de membres du groupe djihadiste en Syrie.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Syrie : l’interminable chute de Baghouz et de ce qu’il reste du « califat » de l’EI

Entraîné au combat pendant un été à Homs, après un an de formation religieuse à Rakka, Ayman Farhan Amek n’a combattu que deux fois dans sa vie. « J’aimais participer aux batailles mais mon maître ne me laissait pas y aller. Des combattants m’ont dit que, si j’étais tué d’une balle dans la tête, j’irais directement au paradis », affirme l’adolescent. Il a combattu une journée dans les environs de Baghouz avant d’être blessé à la jambe, il y a deux mois, dans une frappe aérienne sur sa maison. « Les combattants là-bas étaient si fatigués, sans énergie. Ils avaient faim et étaient détruits mentalement », se souvient-il.

Yemane Farhan Amek, 16 ans, est sorti il y a une semaine et demie de Baghouz. Il va rejoindre sa famille au Canada. Province d’Hassaké, Syrie, le 5 mars 2019.
Yemane Farhan Amek, 16 ans, est sorti il y a une semaine et demie de Baghouz. Il va rejoindre sa famille au Canada. Province d’Hassaké, Syrie, le 5 mars 2019. LAURENCE GEAI POUR “LE MONDE”

Il a quitté Baghouz, sans rien dire à son maître saoudien, Abu Bassir Al-Jazraoui, et à sa famille. « Je l’aimais du fond de mon cœur parce qu’il m’a appris beaucoup de choses, sur la religion, sur la vie, dit-il de celui qu’il a accompagné, pendant près de trois ans, dans tout le « califat » pour collecter les taxes. Il m’a dit de ne pas partir maintenant mais j’avais très faim. Les familles fuient Baghouz à cause de la faim et pour les enfants, pas à cause des bombardements. »

La haine de leur terre

Deux cents yézidis, femmes et enfants, ont été, comme lui, sauvés des griffes de l’Etat islamique dans la reconquête de la province syrienne de Deir ez-Zor ces derniers mois. Une goutte d’eau parmi les plus de 3 000 disparus que dénombrait encore le Bureau de sauvetage des otages yézidis à Dohuk, en Irak, en novembre 2018, sur les 6 417 yézidis pris en otage par l’EI dans le Sinjar en août 2014. Dans le village syrien de Goumar, près de Hassaké, Mahmoud Racho, un yézidi, les accueille pour quelques jours ou quelques semaines de convalescence, avant qu’ils ne retrouvent leurs familles en Irak ou à l’étranger. Endoctrinés, parfois entraînés militairement, les adolescents se sont vu inculquer la haine de leur terre – le Sinjar –, de leur religion – le yézidisme – et de leur langue – le kurde. Ils se sont enfuis du « califat » à contrecœur.

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