Le coronavirus aggrave encore la situation des migrants vénézuéliens en Colombie

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Le pont Simon-Bolivar entre la Colombie et le Venezuela, fermé, le 14 mars.
Le pont Simon-Bolivar entre la Colombie et le Venezuela, fermé, le 14 mars. EDINSON ESTUPINAN / AFP

Au pied du pont Simon-Bolivar, qui sépare la Colombie du Venezuela, le quartier de La Parada grouille de monde en temps normal. Mais samedi 14 mars, la frontière entre les deux pays a été officiellement fermée jusqu’au 30 mai, pour cause de coronavirus. Seuls quelques magasins ont levé leur rideau de fer. Les vendeurs ambulants ont plié bagage. Les cantines populaires qui offraient des déjeuners gratuits ont été fermées. « La faim va faire plus de morts que le Covid-19 », pronostique José Luis Muñoz, porte-parole du Réseau humanitaire d’aide aux migrants, qui réunit plusieurs organisations de terrain.

A Bogota, Felipe Muñoz, directeur des frontières, justifie : « Nous avons été contraints de prendre des mesures de réduction de la mobilité pour éviter les attroupements de foule sur les ponts et devant les postes-frontières. » Côté colombien, l’armée et la police ont été déployées pour tenter de contrôler les « trochas », ces dizaines de sentiers clandestins qui permettent de passer d’un pays à l’autre. M. Muñoz précise : « La fermeture de la frontière touche les Vénézuéliens autant que des Colombiens. »

Près de la moitié des 55 000 personnes qui, tous les jours, traversent la frontière pour venir travailler ou faire leur marché en Colombie – et rentrer chez eux le soir venu – ont en effet la double nationalité. Le Venezuela, riche en pétrole et pacifique, a accueilli des milliers de Colombiens avant que la crise économique de ces dernières années n’inverse le flux migratoire.

Des urgences structurellement saturées

Depuis le début de l’année, le flux de migrants s’était ralenti. « Il a chuté cette semaine parce que les autorités vénézuéliennes contrôlent désormais les déplacements », explique Felipe Muñoz. Plusieurs Etats du Venezuela ont été mis en quarantaine, dont celui du Tachira, le long de la frontière.

Mais les Vénézuéliens qui font le choix de l’exil et les Colombiens qui font celui du retour sont encore nombreux. « Probablement plusieurs centaines par jour », estime un fonctionnaire du Haut-Commissariat aux réfugiés. La frontière, longue de 2 219 kilomètres, est impossible à verrouiller.

Des Vénézuéliens tentent d’entrer en Colombie, le 15 mars à Cucuta.
Des Vénézuéliens tentent d’entrer en Colombie, le 15 mars à Cucuta. SCHNEYDER MENDOZA / AFP

Le directeur de l’hôpital public Erasmo-Meoz à Cucuta, ville frontalière côté colombien, ne cache pas son angoisse. « Je ne voudrais pas contribuer à la panique générale. Mais la situation s’annonce dantesque, soupire le docteur Juan Agustin Ramirez. Si les pays européens, avec tous les moyens dont ils disposent, sont en difficulté, comment croire que nous allons pouvoir ici éviter une tragédie ? » Le médecin rappelle que le taux d’occupation du service des urgences de son hôpital était de 200 %, avant même l’arrivée du coronavirus. Et que des malades y meurent faute de respirateurs artificiels. « La crise du système de santé publique est nationale, rappelle M. Ramirez. Mais ici, à Cucuta, nous devons faire face, en plus de tous nos problèmes structurels, au défi de la migration vénézuélienne. Je crains le pire dans les mois qui viennent ».

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