Le Kenya s’inquiète des effets de l’invasion de criquets sur son économie

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Une nuée de criquets pèlerins dans le comté de Samburu, au centre du Kenya, le 17 janvier 2020.
Une nuée de criquets pèlerins dans le comté de Samburu, au centre du Kenya, le 17 janvier 2020. Njeri Mwangi / REUTERS

A lui seul, le criquet pèlerin, grosse sauterelle d’environ 2 grammes, est un animal bien inoffensif. Mais ce sont des centaines de milliards d’insectes qui envahissent actuellement la Corne de l’Afrique, regroupés en gigantesques essaims qui dévorent toute la végétation sur leur passage. Ainsi, au Kenya, des nuées allant jusqu’à 60 kilomètres de long sur 40 kilomètres de large ont été observées : elles peuvent « manger l’équivalent de la nourriture consommée par 80 millions de personnes en un seul jour », a alerté l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) dans une note publiée le 29 janvier.

Dans la région, les pluies exceptionnelles des derniers mois, offrant de la nourriture en abondance, ont créé des conditions idéales pour la reproduction des insectes. Résultat : une telle invasion de criquets pèlerins, « nuisible migrateur le plus dangereux au monde » selon la FAO, n’avait pas été observée dans la Corne de l’Afrique depuis vingt-cinq ans. Au Kenya, où leur venue est moins fréquente qu’en Ethiopie ou en Somalie, on n’avait pas vu ça depuis plus de soixante-dix ans.

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Après avoir tardé à réagir, la première économie d’Afrique de l’Est commence à se faire sérieusement du souci. D’autant que le nombre des envahisseurs pourrait encore être multiplié par 500 d’ici au mois de juin, selon la FAO. Dans un document de prévision budgétaire publié mi-janvier, le ministère des finances souligne que « l’invasion de criquets observée dans le pays fin 2019 et début 2020 pose un risque pour la production agricole et la sécurité alimentaire ». L’agriculture est le pilier de l’économie kényane. Elle représente à elle seule 34 % du produit intérieur brut (PIB), avec à la fois des cultures alimentaires, comme le maïs, et des cultures d’export telles le thé noir – dont le Kenya est le premier exportateur au monde – ou le café.

Incertitude quant à l’impact final

Un véritable contre-la-montre est désormais lancé, à coups d’épandages aériens de pesticides. D’abord parce que les criquets, qui se concentraient jusqu’à présent dans les comtés arides et semi-arides du nord du pays (Marsabit, Wajir, Samburu), où ils ont rudement impacté les pâturages, atteignent désormais le centre (Meru, Embu, Muranga), à fort potentiel agricole. « Les criquets se dirigent des régions d’élevage vers certains des greniers à blé du pays, détaille Tobias Takavarasha, représentant de la FAO au Kenya. Il faut contrôler leur progression avant mars, car c’est la période où les semis vont commencer. C’est pourquoi il est très important pour la sécurité alimentaire d’intensifier les épandages maintenant. » L’institution onusienne mène actuellement des études de terrain qui permettront d’« ici à environ deux semaines » d’avoir une idée plus précise des dégâts déjà occasionnés.

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L’incertitude domine pour l’instant quant à l’impact final de l’invasion des criquets, qui se déplacent au gré des vents et peuvent parcourir 150 kilomètres par jour. Mais au-delà de la production agricole, un effet domino sur l’économie est déjà anticipé. « Il y a un risque systémique car tous les secteurs peuvent être affectés », juge l’économiste Michael Chege, professeur à l’université de Nairobi.

Possible perte de valeur de la monnaie

De moindres récoltes vont jouer sur les prix. « L’inflation avait déjà commencé à monter en décembre en raison des très fortes pluies. Et on verra très probablement un impact des criquets sur les prix en février », ce qui impactera le pouvoir d’achat des ménages, estime Churchill Ogutu, analyste senior à la banque d’investissement Genghis Capital. Mi-2018, rappelle-t-il, une invasion de chenilles légionnaires, un autre ravageur, avait ponctuellement fait grimper l’inflation à 20 %. Selon lui, cette dernière devrait se limiter à environ 11 % dans les deux prochains mois, soit tout de même le double du niveau actuel, à condition que les régions agricoles de l’ouest et la vallée du Rift restent épargnées.

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Si les exportations agricoles chutent, poursuit Michael Chege, « cela signifie qu’il y aura moins de dollars disponibles dans les réserves de change, entraînant une dépréciation du shilling, et donc une augmentation du coût des produits importés, comme le pétrole ». Autre conséquence de cette possible perte de valeur de la monnaie kényane face au billet vert, « il sera plus cher de rembourser la dette ». Or, ces dernières années, l’endettement a explosé, notamment vis-à-vis de la Chine. Ce fardeau pèse lourdement sur le budget de l’Etat, déjà très serré. Mais le gouvernement va devoir trouver des fonds pour lutter contre l’invasion (achat des pesticides, subventions, etc.) au moins jusqu’en juin. A cette date, les conditions météorologiques deviendront moins favorables. En 2018, « la lutte contre les chenilles légionnaires lui avait coûté quelque 10 milliards de shillings », soit 90 millions d’euros, rappelle Churchill Ogutu.

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