Cent ans après, voyage dans la « capitale » de la Prohibition aux Etats-Unis

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Bruce Bailey, law director for the City of Westerville, poses for a portrait near the sculpture

JOSHUA A. BICKEL POUR « LE MONDE »

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Publié aujourd’hui à 01h42

Protestant, républicain, rural, impeccablement cravaté, Bruce Bailey est un homme du Midwest. Un brin rugueux mais fort sympathique, cet avocat de 67 ans confesse une petite faiblesse pour les manhattans, ces cocktails à base de whisky. Mais cent ans après l’entrée en vigueur, le 17 janvier 1920, de la Prohibition aux Etats-Unis, cela ne l’empêche pas d’affirmer : « Nous sommes du bon côté de l’histoire. » « Nous », ce sont les 40 000 habitants de Westerville, bourgade perdue de l’Ohio. « Il y a cent ans, nous étions une petite ville de 1 500 habitants qui a changé le cours de l’histoire américaine en devenant le siège de la puissante et intransigeante Ligue anti-saloons [ASL]. » En quelques années, les protestants militants de l’ASL réussirent là où mille organisations avaient échoué : persuader les Américains de bannir la production et la vente d’alcool dans l’ensemble des Etats-Unis, par le 18e amendement de la Constitution américaine.

Au Musée de la Prohibition, à Westerville (Ohio), le 15 janvier.
Au Musée de la Prohibition, à Westerville (Ohio), le 15 janvier. JOSHUA A. BICKEL POUR « LE MONDE »

« Beaucoup de gens ricanent, estime M. Bailey, car l’expérience se solda, après des années de crime, de corruption et d’hypocrisie qui firent les délices d’Hollywood, par l’abolition de la Prohibition, en 1933. Mais l’alcoolisme était un immense problème qui ravageait les Etats-Unis, qu’aucune des précédentes tentatives n’avait résolu. Il ne l’est d’ailleurs toujours pas », poursuit l’avocat, citant le cas de son frère, mort d’excès de boisson, il y a quatre ans.

Devant la mairie de Westerville, dont il dirige les affaires juridiques, M. Bailey nous présente le monument qu’il a fait ériger pour le centenaire de la Prohibition, signé de l’artiste Matthew Gray Palmer. Sous un tonneau éventré qui n’en finit pas de se vider, un immense coin fracture un bloc de marbre censé incarner l’Amérique. Le coin, à double face, est comme un accéléré de ce moment d’histoire : d’un côté, les bonnes raisons qui ont conduit à l’adoption de la Prohibition ; de l’autre, les dérives qui ont amené à sa suppression, treize ans plus tard. « Les divisions d’aujourd’hui nous rappellent celles d’hier », poursuit l’avocat. Ruraux contre urbains, protestants contre catholiques, Américains « de souche » contre immigrés irlandais, allemands, juifs ou italiens.

« Réveil protestant »

Comment ceux qui se présentaient comme les « vrais » Américains en sont-ils arrivés à prohiber l’alcool au début du XXe siècle ? Parce que le pays était devenu une « nation d’ivrognes », pour reprendre l’expression du réalisateur américain Ken Burns, auteur d’un documentaire de référence sur la Prohibition. Au XIXe siècle, l’eau était rarement potable, mais l’alcool coulait à flots – en 1830, les Américains boivent en moyenne 27 litres d’alcool pur par an, trois fois plus qu’actuellement. Le whisky, de qualité médiocre, fait des ravages et, en 1840, six alcooliques de Baltimore créent un mouvement de tempérance, les Washingtoniens. La croisade est vite récupérée par les Eglises protestantes, qui ne se satisfont pas du volontariat et veulent imposer la sobriété par la loi. C’est à ce stade de l’histoire qu’entre en scène la petite ville de Westerville, colonisée en 1818 par trois méthodistes venus de l’Etat de New York, les frères Westervelt.



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