Autopsie d’un enlisement de la France au Sahel

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Un véhicule de l’opération antiterroriste française « Barkhane » en patrouille dans la région du Gourma, au Mali, en juillet 2019.
Un véhicule de l’opération antiterroriste française « Barkhane » en patrouille dans la région du Gourma, au Mali, en juillet 2019. Benoit Tessier / REUTERS

Le Livre. Au moment où la France réfléchit aux modalités de son intervention militaire au Sahel, voici un ouvrage qui a le mérite de ne pas y aller par quatre chemins. Au Mali et dans les pays voisins, notre armée mènerait « une guerre perdue », affirme ainsi Marc-Antoine Pérouse de Montclos. Directeur de recherche à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), ce spécialiste des questions africaines estime nécessaire de préparer un désengagement français, la seule question valable étant de savoir « quand et comment ».

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L’intérêt du livre tient cependant moins à ses préconisations pour sortir du bourbier sahélien qu’à son examen d’un échec, selon lui, programmé d’avance. Un scénario d’enlisement qu’il dit avoir brandi dès les prémices de l’intervention, déclenchée en 2013 par François Hollande.

A n’en pas douter, après sept ans de présence militaire active, le bilan est décevant. Les opérations « Serval » puis « Barkhane » ne sont pas venues à bout des groupes insurrectionnels et djihadistes. Au contraire, ceux-ci se sont dispersés et étendus géographiquement en dehors du Mali, tandis que les violences intercommunautaires ont redoublé d’intensité.

Prise au piège

Au fondement de cet échec, Marc-Antoine Pérouse de Montclos pointe un défaut d’analyse sur les racines des troubles au Sahel, confinant à l’aveuglement idéologique : à l’ère du djihadisme globalisé, la France, laïque et républicaine, s’est lancée de façon quasi messianique dans une guerre contre le terrorisme et la menace d’un nouvel Etat islamique. Au risque de négliger les ressorts propres aux pays de la région. Or le vernis est religieux mais les agendas sont locaux : les mouvements se greffent sur des conflits de bétail et d’accès à la terre. Surtout, le djihadisme au Mali est avant tout le symptôme d’un Etat défaillant, miné par la corruption et incapable d’exercer sa souveraineté.

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Pour le chercheur, voilà la France prise au piège. En intervenant militairement, elle garantit la pérennité des gouvernements en place. Ce faisant, elle ôte toute incitation à se réformer à des régimes corrompus et parfois très autoritaires. Plus grave encore, selon lui, elle travaille de concert avec des armées locales déficientes, coupables d’exactions et de massacres de civils perpétrés en toute impunité au nom de la lutte contre le terrorisme. « Comment alors s’étonner que les Sahéliens la perçoivent comme une puissance néocoloniale responsable de tous leurs malheurs ? », s’interroge-t-il sans détour.

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Ce fin connaisseur du Nigeria et de la secte islamiste Boko Haram rappelle que le cas malien fait écho à des problématiques généralisées à l’ensemble de la zone. Il sait aussi le caractère politiquement sensible du sujet sahélien en France. Ancien rédacteur en chef de la revue Afrique contemporaine, il a démissionné en mars 2019 après qu’un dossier consacré au conflit malien a été suspendu par l’autorité de tutelle de la publication, l’Agence française de développement.

Une guerre perdue, de Marc-Antoine Perouse de Monclos (éd. JC Lattès, 200 p., 18 €).

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