A Madagascar, semaine décisive pour le nouveau code minier

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Une mine de l’entreprise Rio Tinto à Tolagnaro, sur la côte sud-est de Madagascar, en avril 2007.
Une mine de l’entreprise Rio Tinto à Tolagnaro, sur la côte sud-est de Madagascar, en avril 2007. Ed Harris / REUTERS

Dans un premier temps, le texte a fait son chemin en silence. Au point que les principaux intéressés ont découvert dans les médias qu’un nouveau code minier était en passe d’être adopté. Puis, très vite, le ton est monté et c’est devenu un véritable scandale. Au point que ce texte, qui aurait dû être présenté en conseil des ministres, puis adopté par l’Assemblée nationale, a été stoppé après son vote en conseil du gouvernement.

La levée de boucliers de la société civile et du secteur privé a suspendu le processus législatif et a obligé à l’ouverture d’une discussion. Et cette semaine aura lieu une réunion « avec toutes les parties prenantes » pour la mise en place d’un comité chargé de discuter de ce projet de loi, a indiqué le ministère des mines et des ressources stratégiques.

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Dans un pays où le secteur minier représente 30 % des recettes d’exportation, soit 600 millions de dollars (540 millions d’euros), et 40 % des investissements directs étrangers en 2016, selon les chiffres de l’Economic Development Board of Madagascar, le remplacement du code en vigueur depuis 2005 est un sujet ultra sensible. Deux mesures crispent particulièrement les opérateurs privés : l’augmentation des taxes et le mode de perception choisi par l’Etat.

Un article du nouveau code (l’article 21), censé remplacer celui de 2005, prévoit le relèvement des redevances minières sur chaque groupe de substances (minerais, métaux précieux, pierres fines brutes…) de 2 %. Si le texte est adopté, les pierres précieuses brutes et les fossiles seront taxés à hauteur de 8 %. L’autre disposition qui fait débat est à l’article 24, qui lui aussi augmente la redevance due à l’Etat puisqu’il stipule que ce dernier « a droit à une part de production à hauteur de 20 % minimum dans toute production minière commercialisable ».

« Le levier d’émergence »

Pour clore le dispositif, l’obtention du permis d’exploitation coûtera désormais 2 milliards d’ariarys (environ 480 000 euros) et le permis de recherche 200 millions d’ariarys (environ 48 000 euros). C’est une première pour les investisseurs qui jusqu’alors formulaient une demande auprès du cadastre minier sans avoir à s’acquitter de ces frais.

« Ce sont des mesures anti-économiques », s’insurge Jean-Luc Marquetoux, le président de la Chambre des mines de Madagascar, qui déplore qu’on aboutisse à une fiscalité minière minimum de 24 %, soit d’un quart des revenus… « Pourquoi ne pas plutôt s’attaquer au secteur informel, très développé à Madagascar, qui échappe à toute forme de fiscalité ? », interroge-t-il, avant d’estimer qu’il faudrait distinguer dans le nouveau code partage de production et prise de participation.

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Si la seconde formule est assez répandue en Afrique, la récupération par l’Etat d’une part de la production reste en revanche une approche un peu différente, surtout utilisée pour l’heure dans l’industrie pétrolière. La formule permettrait aux institutions publiques d’engranger directement des recettes et de contrer le temps de latence entre un début d’exploitation et la phase de rentabilité. Car si l’Etat est seulement actionnaire, il se condamne à patienter cinq à dix ans dans le cas des exploitations minières. Un délai trop long pour un Etat en quête de liquidités.

« En cinquante ans d’indépendance, les retombées du secteur minier et extractif n’ont pas eu d’impacts palpables sur l’économie nationale, rétorque le ministre des mines et des ressources stratégiques, Fidiniavo Ravokatra. Le secteur des mines est inscrit comme le levier d’émergence dans la Grande Ile dans la politique générale de l’Etat. » Ce dernier précise vouloir rétablir l’équité dans le triptyque Etat-investisseurs-population locale en matière de retombées économiques. « D’où une volonté de créer de nouvelles structures et d’assainir et réviser le mode de gestion des permis miniers », complète-t-il.

Une inquiétude générale

Sur la Grande Ile, aujourd’hui, deux types d’entreprises se partagent le secteur. Aux côtés des trois majeures – Ambatovy et QMM Rio Tinto (dont l’Etat est actionnaire à 20 %) et la Kraoma (société d’Etat) –, se greffe une longue liste d’exploitations artisanales dans les secteurs formel et informel. Le projet australien Base Tulear, qui devait extraire de l’ilménite, a été suspendu mi-novembre en conseil des ministres et fait partie des grosses exploitations. Si cette réforme venait à passer, il serait le seul projet de cette envergure concerné dans l’immédiat.

Car les trois plus grosses exploitations ne sont pas soumises au régime général. En tant que société d’Etat, Ambatovy est régie par la loi sur les grands investissements miniers, et QMM Rio Tinto par une convention d’établissement qui touche bientôt à sa fin et doit être renégociée avec l’Etat malgache. Mais pour M. Marquetoux, même le fait de déroger à la règle générale n’empêchera pas ces entreprises de voir « dans ce texte une potentielle source de fragilisation de leur situation ».

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Dans cette cacophonie, la société civile a elle aussi fait entendre sa voix. Lors du Forum des mines du 21 décembre 2019, elle a même boycotté le discours du ministre des mines regrettant que « le processus ne soit absolument pas transparent, comme s’indigne Ndranto Razakamanarina, président de l’Alliance Voahary Gasy (AVG). Nous faisons des recommandations au gouvernement depuis 2015 sur le volet social et environnemental pour que les communautés sur place soient considérées et avons été très surpris d’apprendre le vote de ce texte en conseil de gouvernement. »

La façon dont le texte a été adopté a suscité une inquiétude générale qui a débordé la sphère nationale. Ainsi, remarque un bailleur étranger, le texte n’a pas convaincu les experts mobilisés sur le sujet et d’ajouter que « cet avant-projet est un bon indicateur de ce que veut faire l’équipe dirigeante ». Même si la semaine qui s’ouvre sera celle de la concertation.

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