Sans gouvernement, la Tunisie plonge dans l’incertitude

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Le premier ministre tunisien désigné, Habib Jemli, arrive au parlement le 10 janvier. AFP / FETHI BELAID
Le premier ministre tunisien désigné, Habib Jemli, arrive au parlement le 10 janvier. AFP / FETHI BELAID FETHI BELAID / AFP

La Tunisie n’a pas de gouvernement depuis les élections législatives d’octobre 2019 et cette vacance du pouvoir devrait perdurer : vendredi 10 janvier, tard dans la soirée, les députés tunisiens ont refusé leur confiance au gouvernement proposé par Habib Jemli, premier ministre choisi par le parti islamo-conservateur Ennahda. Seuls 72 parlementaires l’ont approuvé, très loin de la majorité requise de 109 voix.

Ses détracteurs ont critiqué un gouvernement « faible » dont la composition a pris trop de temps et a fait l’objet d’erreurs stratégiques, comme le choix de plusieurs ministres et secrétaires d’Etat soupçonnés de corruption. Beaucoup ont aussi exprimé un « manque de confiance dans son indépendance », alors même qu’Habib Jemli affirmait avoir constitué un cabinet de personnalités « indépendantes », choisies « sur la base de la compétence, l’intégrité ».

Camouflet politique pour Ennahda

Ce refus est un camouflet politique pour Ennahda, qui avait désigné M. Jemli le 15 novembre. Le parti islamo conservateur, qui détient 54 sièges sur 217, avait réussi pendant neuf ans à composer avec les différentes forces politiques et à peser lors des votes à l’assemblée. Cette fois, le manque d’alliés lui a fait défaut. Cet échec pourrait aussi augurer le début d’une reconfiguration politique à l’assemblée au sein de laquelle, malgré le morcellement des partis et des tendances, un front d’opposition semble se dégager.

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Les négociations, laborieuses, auront duré jusqu’à la dernière minute. La réunion en catimini le jour du vote entre Rached Ghannouchi, le président de l’assemblée et leader historique d’Ennahda, et Nabil Karoui, dirigeant du parti Qalb Tounes (Au cœur de la Tunisie) s’est conclue par un refus ferme de l’ex-magnat de la télévision et candidat malheureux à la présidentielle de soutenir le gouvernement. Son parti avait pourtant voté en faveur de la présidence de Rached Ghannouchi au parlement en novembre.

Autre revirement de taille : Nabil Karoui a rencontré son principal ennemi politique, Youssef Chahed, leader de Tahya Tounes et ancien chef du gouvernement, la veille du vote. « Nous avons trouvé qu’il était temps d’entamer le dialogue », commente Karim Baklouti Barketallah, membre du bureau politique du parti Tahya Tounes qui détient 14 sièges à l’assemblée. Cette réunion aura amené Qalb Tounes à rallier une coalition anti-gouvernement Jemli regroupant les forces de gauche telles que le Courant démocrate et le mouvement du peuple, le fervent anti-Ennahda Parti destourien libre, et plusieurs blocs de petits partis et d’indépendants.

Manque de foi dans le régime parlementaire

« On ne peut pas vraiment se permettre un vide gouvernemental encore un mois », s’inquiétait Nourredine Arbaoui, député d’Ennahda et membre du bureau politique la veille du vote, confiant déjà avoir « de sérieux doutes » sur la possibilité d’obtenir suffisamment de voix pour que le gouvernement passe. Vendredi, malgré une présentation de près d’une heure de son futur programme avec une batterie de mesures pour lutter contre la corruption et la contrebande, ou encore un fond de lutte contre la pauvreté, Habib Jemli n’a pas su convaincre son audience.

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Après cet échec, la suite de la séquence politique qui s’ouvre en Tunisie reste imprévisible. Selon la constitution, c’est au président de la République, Kaïs Saïed, de choisir un nouveau chef du gouvernement qui devra à son tour composer une équipe. Elu en octobre avec une large majorité, cet ancien universitaire spécialiste de droit constitutionnel a plusieurs fois manifesté son manque de foi dans le régime parlementaire et sa volonté de réviser la constitution pour le supprimer, ainsi que son indépendance vis-à-vis des partis.

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Pourtant certains politiques sont confiants. « Il a la légitimité populaire et il a l’expérience de ces deux derniers mois, peut-être qu’il saura unir les forces politiques là où Jemli a échoué », avance Karim Baklouti Barketallah.

En cas de nouvel échec, le président peut dissoudre l’assemblée et organiser des élections anticipées. Au risque de prolonger le vide politique et de retarder l’adoption de mesures nécessaires dans un pays qui affronte une mauvaise passe économique. Depuis la révolution, neuf gouvernements se sont déjà succédés.

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