En Arizona, les chemins de traverse du rêve américain

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DAMON CASAREZ POUR M LE MAGAZINE DU MONDE

Par Pierre Sorgue

De nombreux Américains en difficulté se retrouvent chaque année privés de logement et jetés sur les routes. En janvier, certains convergent avec leur camping-car à Quartzsite, en Arizona, pour un festival de la débrouille.

Autour du grand feu, le chant s’élève dans la nuit bleue. Ils sont bien trois cents, emmitouflés dans des vestes et des bonnets, à fredonner sous la pleine lune qui éclaire un coin poussiéreux du désert de Sonora, en Arizona.

Mais les voix sont retenues, comme s’il s’agissait de ne pas déranger ce grand vide peuplé de quelques coyotes et de cactus saguaro. Comme si les femmes et les hommes réunis pour cette soirée d’adieu osaient à peine reprendre les mots de Woody Guthrie : « This land was made for you and me », Cette terre fut faite pour toi et moi.

La plupart n’ont d’autre logement que le pick-up, la caravane ou le van (leur RV, recreational vehicle, en VO) qu’ils ont garés pour quelques jours entre les buissons des arbustes à créosote. Il y a des jeunes, mais beaucoup sont des retraités qui conduisent au gré du pays et des petits boulots, sur les bas-côtés du « rêve américain ». Ils sont les perdants d’un pays qui mesure la réussite en dollars, celle qu’incarne le président milliardaire que nombre d’entre eux, paradoxalement, ont contribué à faire élire. Mais, ce soir, ils veulent croire que leur mode de vie fait aussi partie du grand récit national lorsqu’il s’écrit sur la route.

« Nous revenons au fondement de l’Amérique : si tu n’es pas bien, fais ton sac et pars… » Bob Wells, fondateur du Rubber Tramp Rendezvous

C’est ce que dit l’homme qui se tient debout, au milieu du cercle. Avec sa barbe fournie et ses longs cheveux blancs, Bob Wells, 63 ans, a l’allure du sage ou du gourou. Depuis huit ans, il organise cette rencontre d’une douzaine de jours baptisée « Rubber Tramp Rendezvous » – le rendez-vous des vagabonds de la gomme.

Ils étaient quarante-cinq à le rejoindre en 2010, et cette année, en janvier, entre 8 000 et 10 000 sont passés ici, assure-t-il, lorsqu’il reçoit dans son fauteuil de camping en compagnie de son chien, Cody : « Il n’y a jamais eu autant de gens qui vivent sur la route. Dans ce pays où le contrat social n’existe plus, tu peux te retrouver à la rue du jour au lendemain. Un tiers des Américains n’ont pas un penny en banque. Alors, je leur offre une solution pour vivre avec dignité, retrouver une forme de liberté. Nous revenons au fondement de l’Amérique : si tu n’es pas bien, fais ton sac et pars… »

Bob Wells, à l’origine du Rubber Tramp Rendezvous, avec son chien, Cody.
Bob Wells, à l’origine du Rubber Tramp Rendezvous, avec son chien, Cody. Damon Casarez pour M Le magazine du Monde

Depuis vingt-trois ans que Bob Wells brûle le macadam, à la suite d’un divorce onéreux et de dettes du côté d’Anchorage (Alaska), il ne se lasse pas : « Tu voyages, tu fais des économies… En six mois, je suis tombé amoureux de cette vie. » Il a écrit un livre puis créé un site et une chaîne YouTube, Cheap-RVliving (vivre pas cher en camping-car) pour dispenser ses conseils pratiques et ses réflexions sur le consumérisme.

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