« L’économie rentière libanaise a engendré des niveaux d’inégalité extrêmes »

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Dans une tribune au « Monde », Lydia Assouad, spécialiste des inégalités au Liban, estime que si le mouvement de protestation actuel dépasse les divisions religieuses, c’est que les Libanais ont découvert ce qu’ils avaient en commun : leur exploitation par les plus nantis.

Publié aujourd’hui à 06h00 Temps de Lecture 4 min.

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Tribune. Pour la première fois depuis la fin de la guerre civile, en 1990, les Libanais sont unis dans une révolte, indépendamment de leurs origines sociales, géographiques ou religieuses. Les manifestants réclament la fin d’un régime politique corrompu, maintenu par une élite qui leur a trop longtemps nié la possibilité de vivre de manière décente.

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« Au Liban, les 0,1 % les plus aisés (3 700 individus) captent 10 % des revenus. C’est autant que ce que reçoivent les 50 % les plus pauvres (près de 2 millions de personnes) »

Les revendications des manifestants ne sont pas surprenantes lorsqu’on regarde les chiffres. Le Liban fait partie des pays les plus inégalitaires du monde, à côté du Chili, du Brésil ou encore de l’Afrique du Sud. Dans une étude publiée par le Laboratoire sur les inégalités mondiales, j’ai pu estimer la répartition du revenu national libanais entre 2005 et 2014. Les résultats parlent d’eux-mêmes : les 1 % les plus aisés perçoivent 25 % des revenus. A titre de comparaison, en France, où les inégalités augmentent et sont au cœur du débat public, les 1 % les plus riches perçoivent 11 % des revenus. Une autre statistique éloquente au Liban : les 0,1 % les plus aisés (3 700 individus) captent 10 % des revenus. C’est autant que ce que reçoivent les 50 % les plus pauvres (près de 2 millions de personnes).

Ce petit groupe d’ultrariches – qui coïncide largement avec la classe politique – a des niveaux de revenus similaires aux plus riches des pays riches. Les plus démunis, au contraire, ont des niveaux de revenus comparables aux plus pauvres des pays pauvres. Cette polarisation semble avoir exacerbé un sentiment de déconnexion entre la classe dirigeante et le « reste ». Les chiites de la ville de Tyr, dans le Sud, et les sunnites du Nord, à Tripoli, ont enfin trouvé ce qu’ils avaient en commun : l’élite politique extorque des rentes colossales à leurs dépens.

Manque de transparence

Cette concentration extrême des revenus n’est pas un phénomène nouveau et existe au moins depuis 2005, année pour laquelle les premières données fiables sont disponibles. Pourquoi donc les inégalités étaient jusqu’alors absentes du débat public ? Une première raison est le manque remarquable de données socio-économiques basiques au Liban. Le dernier recensement date de 1932. Le secret bancaire existe depuis 1956. La dernière étude estimant la répartition des revenus avant la mienne datait de 1960 ! Ce manque de transparence a facilité la diffusion d’un discours sous-estimant la portée des inégalités.

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