En Russie, un féminicide relance le débat sur le fléau des violences conjugales

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Oleg Sokolov, lors de son audience.
Oleg Sokolov, lors de son audience. ANTON VAGANOV / REUTERS

C’est un crime qui suscite un débat sur l’impunité des auteurs de violences conjugales en Russie. A l’issue d’une audience lundi 11 novembre après-midi devant un tribunal de Saint-Pétersbourg, un juge a placé Oleg Sokolov, historien russe renommé, qui a reconnu avoir tué et démembré sa compagne, en détention provisoire jusqu’au 8 janvier.

La police avait extrait l’éminent professeur, en état d’ébriété, samedi matin de la rivière Moïka, dans l’ancienne capitale impériale, portant un sac à dos où se trouvaient deux bras de femme et un pistolet d’alarme.

Depuis, à une poignée de kilomètres, d’autres fragments du corps de la victime ont été retrouvés dans un autre cours d’eau. L’historien de 63 ans a avoué avoir tué et démembré une de ses anciennes étudiantes, Anastassia Echtchenko, 24 ans, dont il partageait la vie.

Blême, mal rasé, vêtu d’un jean et d’un pull rouge, M. Sokolov, un habitué des reconstitutions historiques flamboyantes en costume de l’époque du Premier Empire français (1804-1814), s’est couvert le visage des mains devant le juge pour sangloter avant d’accuser la victime de l’avoir attaqué la première.

« Ces derniers temps, elle devenait folle lorsqu’il était question de mes enfants » d’un précédent mariage, a-t-il dit au juge. Selon lui, la « jeune femme idéale s’est transformée (…) elle a attaqué au couteau ». « Je suis en état de choc, j’ai des remords », a-t-il ajouté. Son avocat, Alexandre Potchouev, a évoqué la possibilité de plaider la « légitime défense ».

Fléau de la violence

Plus tôt dans la journée, Sergueï Echtchenko, le frère de la victime, avait affirmé, lui, que « la jalousie » était à l’origine du crime. « Elle lui a dit qu’elle se rendait à l’anniversaire d’un ami étudiant. Il l’a passée à tabac, elle est sortie quand même puis elle est rentrée… », a-t-il relaté au site d’information RBK.

Des associations voient dans cette affaire une nouvelle illustration du fléau des violences faites aux femmes, alors que la Russie a décriminalisé en 2017 les violences familiales et conjugales dans la majorité des cas. La militante pour les droits des femmes Alena Popova a dénoncé un système judiciaire « pourri qui protège les hommes violents jusqu’au moment où l’on a un cadavre. On aurait pu empêcher ce meurtre ».

Selon le quotidien populaire Moskovski Komsomolets et une pétition lancée sur le site Change.org, M. Sokolov avait déjà été mis en cause pour des faits de violences. La pétition, qui a recueilli environ 6 000 signatures en quelques jours, accuse la direction de l’université d’inertie face au comportement pourtant « monstrueux » de ce professeur.

Dans un premier temps, le directeur de l’institut d’histoire de l’université employant l’historien, Abdoulla Daoudov, a vanté les qualités d’Oleg Sokolov et affirmé que « ni les étudiants ni les enseignants ne se sont plaints de lui ».

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Mais, après l’annonce du placement en détention, l’université de Saint-Pétersbourg a annoncé qu’Oleg Sokolov était « démis de ses fonctions ».

Des tendances violentes connues

Une étudiante, qui avait eu une liaison avec Oleg Sokolov en 2008, avait déposé une plainte, affirmant qu’il l’avait attachée à une chaise, frappée au visage et menacée de la marquer au fer rouge parce qu’elle voulait le quitter, selon Moskovski Komsomolets qui publie la plainte en question. Aucune mesure disciplinaire n’avait pourtant été prise, selon les auteurs de la pétition qui ont adressé leur texte au président Vladimir Poutine, un ancien de cette université, et réclamé la démission du doyen et de plusieurs autres responsables universitaires.

Un étudiant de l’université affirme que les tendances violentes du professeur étaient bien connues. « Il y a eu des mises en garde, mais personne n’y a fait attention », assure Ivan Poustovoit. « C’est une preuve de l’impunité dont bénéficient [en Russie] les hommes violents », dénonce Alena Sadikova, qui dirige le centre Kitej d’assistance psychologique aux femmes.

Décoré de la Légion d’honneur

Auteur de plusieurs livres dont certains traduits en français, Oleg Sokolov a été décoré de la Légion d’honneur en 2003 et a travaillé comme conseiller pour des films et documentaires sur Napoléon. Il aimait aussi interpréter les rôles de Napoléon ou de ses généraux dans des reconstitutions historiques de grandes batailles du Premier Empire.

Employé également par l’Issep, l’école fondée par l’ancienne députée d’extrême droite Marion Maréchal, il a été limogé immédiatement à l’annonce de son arrestation. Le porte-parole du Kremlin a quant à lui condamné un « crime effroyable », mais a refusé de lier le meurtre à un débat plus large. « Dans de telles situations, lorsque tout semble indiquer qu’il s’agit d’un acte de folie, c’est le tueur qu’il faut accuser », a estimé Dmitri Peskov.

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