Laura Ruiz de Elvira : « En Syrie,le choix de la répression a réussià Bachar Al-Assad »

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En 2011, à la veille du soulèvement, estime la politiste, les Syriens ne croyaient plus aux discours réformateurs de l’Etat perçu comme une machine qui ne fonctionne plus mais continue de réprimer.

Propos recueillis par Publié aujourd’hui à 13h12

Temps de Lecture 7 min.

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Laura Ruiz de Elvira, 38 ans, est ­politiste à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), spécialiste de la Syrie. Elle a travaillé de 2006 à 2010 dans ce pays à une thèse sur les associations caritatives. Elle vient de publier Vers la fin du contrat social en Syrie. Associations de bienfaisance et redéploiement de l’Etat (2000-2011), publié chez Karthala (352 pages, 25 euros), un ouvrage qui offre un éclairage rare et précieux sur les années qui ont précédé le soulèvement de 2011.

Des paysans syriens de la province de Daraa, à une centaine de kilomètres au sud de Damas, manifestent dans la capitale syrienne, le 9 juillet 2000, pour soutenir le président en exercice, Bachar Al-Assad, un jour avant le plébiscite présidentiel.
Des paysans syriens de la province de Daraa, à une centaine de kilomètres au sud de Damas, manifestent dans la capitale syrienne, le 9 juillet 2000, pour soutenir le président en exercice, Bachar Al-Assad, un jour avant le plébiscite présidentiel. LOUAI BESHARA / AFP

A l’arrivée au pouvoir de Bachar Al-Assad, en 2000, on parle rapidement d’un « printemps de Damas ». Etait-ce un phénomène réel ou une pure opération de communication ?

Je ne travaillais pas sur la Syrie à l’époque, mais il est clair que, pendant quelques mois, les Syriens, y compris les plus sceptiques, ont cru à ce nouveau président et à sa rhé­torique sur la réforme et sur la lutte ­contre la corruption. Cela s’est matérialisé par des ­forums de discussion et par de nombreuses initiatives dans la société civile. Dès 2001 cependant, il y a eu un retournement : la plupart des leaders [de la société civile] qui avaient émergé ont été emprisonnés, les forums fermés. Ceux qui n’ont pas été arrêtés ont été interdits de voyager.

Est-ce dû à un malentendu sur le mot ­« réforme » ? Là où le pouvoir pensait « modernisation », la société entendait « libéralisation »…

Bachar Al-Assad a pris peur, comme son ­entourage, et il est revenu au fondement du régime, c’est-à-dire à la gestion sécuritaire. Il n’y a pas eu de malentendu. La volonté de réformer était là, mais les réformes n’ont pas été bien pensées ni coordonnées. Elles ont été prises ad hoc, sans vision d’ensemble. Le régime n’est jamais parvenu à maîtriser ce processus, ce qui a abouti à une rupture du contrat social.

A l’instar de Jacques Chirac, qui se voyait un peu comme son parrain, la ­communauté internationale a été vite déçue par Bachar Al-Assad. A l’époque, ses hésitations étaient mises sur le compte d’une lutte souterraine entre la jeune et la vieille garde. Etait-ce pertinent ?

Cette grille de lecture reposait en partie sur des faits réels : à son arrivée au pouvoir, ­Bachar Al-Assad a mis de côté des figures de la vieille garde et ramené de jeunes technocrates formés à l’étranger. Il a voulu réformer l’administration, il a créé une ENA syrienne. Mais certaines des personnalités qu’il avait nommées ont été vite écartées – des économistes, par exemple. En revanche, un des penseurs de « l’économie sociale de marché » à laquelle aspirait le régime, Abdallah Dardari [vice-premier ministre pour les affaires économiques, nommé en 2006], est resté au sein du pouvoir jusqu’à 2011.

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