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LAURENCE GEAI POUR « LE MONDE »
FactuelRencontré par « Le Monde » dans un camp tenu par les forces kurdes, le jeune homme a tout juste 18 ans. Il retrace son départ de France, la vie dans un pays en guerre et sa détention sans issue.
Mourad (le prénom a été changé) aura 18 ans le 31 octobre et il ne se souvient plus des titres des livres qu’il aimait emprunter à la bibliothèque de son école primaire. C’était à Roubaix (Nord). Là où il est aujourd’hui, mercredi 30 octobre, dans une prison du nord-est de la Syrie, il n’y a pas de livre. Pas d’image. Quand ses parents l’ont emmené de force sur les terres de l’organisation Etat islamique (EI), il avait 12 ans et si le « califat » n’est plus, il en est resté prisonnier : « J’oublie les choses… »
Mourad a passé les six années qui le séparent de l’enfance sous les bombes et maintenant, en prison. Son visage est secoué de tics. Souvent, d’une main, il se frotte les yeux, assis dans une salle nue de la prison pour djihadistes où on l’a emmené. Il dit que quand il était petit, il aimait la natation et les mathématiques. Mourad a le visage creusé, le corps maigre. Autour de la maison de ses grands-parents, il y avait un grand jardin. Il dit que c’est aujourd’hui la veille de son anniversaire.
Comme tous les autres détenus, il porte une combinaison orange et des sandales en plastique. Les mots se heurtent dans sa bouche. Ils s’étranglent à l’évocation d’un passé qui d’ici paraît impossible. Ils sortent d’un très profond silence. Eclats de la langue de l’enfance, qui peu à peu, en lui, s’efface, ils se brisent contre l’air de la prison. Puis son regard s’enfuit dans des enfers invisibles où les souvenirs des jours heureux peinent à percer.
« J’aimais… j’aimais… l’école. » Il faut remonter le temps. Il faut traverser quelque part, dans le fond de la mémoire cette frontière si lointaine de sa vie antérieure. « Je crois que mon père… Je crois qu’il nous a dit qu’on partait tous en vacances en Turquie. On y est allé et puis il y a eu une nuit… Le matin c’était différent. Les maisons… Il y avait des choses qui explosaient. On avait changé de pays. Mon père a dit qu’on allait s’habituer. »
Répondre à l’appel du nouveau « calife »
Mourad vient d’être sorti d’une cellule où les existences de 154 hommes et jeunes garçons se mêlent dans un magma de corps malades, de couvertures grises et de soupe aux lentilles. Comme tous les autres prisonniers de ce site pénitentiaire, ces hommes ont été capturés à Baghouz en mars. Comme lui, ils faisaient parti des deniers sujets du « califat », des derniers à avoir quitté ce réduit de boue, de métal et de chair humaine qui fut le tout dernier territoire tenu par les djihadistes.
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