Sur les ruines des rêves kurdes

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Publié aujourd’hui à 15h44

Au point de contrôle de l’entrée ouest de Kamechliyé, le regard s’accroche à une colonne de fumée noire qui s’élève depuis un point inconnu, quelque part dans le centre-ville. « Ce sont les camarades qui brûlent des pneus », aassuré le planton en faction. Depuis l’offensive turque du 9 octobre contre les villes syriennes de Tall Abyad et Ras Al-Aïn, tenues par les forces kurdes, et les volées de tirs d’artillerie qui frappaient jusqu’à Kamechliyé, il arrivait en effet aux « camarades », ainsi que se nomment entre eux les combattants du mouvement kurde, de brûler des pneus. Pour aveugler les drones dans une tentative dérisoire de lutter contre la mort tombant du ciel ? Pour donner à cette ville encore attachée à la paix, avec ses pâtisseries pleines de gâteaux au miel, les atours plus réalistes d’une cité en guerre ?

Soline, 15 ans, originaire de Kamechliyé (Nord-Est syrien), pose avec son luth, instrument traditionnel kurde, le 21 octobre, au camp de réfugiés de Bardarash (Kurdistan irakien). Elle a fui la Syrie avec sa mère et son frère trois jours auparavant. Sur les quelques photos qu’elle a emportées, on peut voir les autres membres de sa famille restés en Syrie. C’est la deuxième fois qu’ils viennent se réfugier en Irak. Ils étaient déjà là en 2014. Nadja, la mère de Solin, nous dit : « Le Rojava, c’est notre maison, on a jamais voulu la quitter. »
Soline, 15 ans, originaire de Kamechliyé (Nord-Est syrien), pose avec son luth, instrument traditionnel kurde, le 21 octobre, au camp de réfugiés de Bardarash (Kurdistan irakien). Elle a fui la Syrie avec sa mère et son frère trois jours auparavant. Sur les quelques photos qu’elle a emportées, on peut voir les autres membres de sa famille restés en Syrie. C’est la deuxième fois qu’ils viennent se réfugier en Irak. Ils étaient déjà là en 2014. Nadja, la mère de Solin, nous dit : « Le Rojava, c’est notre maison, on a jamais voulu la quitter. » LAURENCE GEAI POUR “LE MONDE”

Le planton se trompait. Après quelques minutes d’un trajet bringuebalant dans des rues désertes, couvertes des slogans révolutionnaires kurdes et de fresques représentant des combattantes, une odeur différente de celle du caoutchouc brûlé racontait une autre histoire. C’était le 11 octobre et, parmi une foule angoissée, filmant l’incendie grâce à une noria de téléphones portables, des hommes et des femmes armés vaquaient, impuissants.

Les traits du visage tirés, mais le pas aussi assuré que s’il s’agissait d’un jour de marché, une cadre du mouvement kurde a lâché deux mots : « Voiture piégée. » Un véhicule chargé d’explosifs avait sauté, tuant cinq personnes. Quelques heures plus tard, l’attentat était revendiqué par l’organisation Etat islamique (EI). Alors que le conflit qui opposait depuis 1984 le mouvement kurde à Ankara a débordé en Syrie, la lutte que l’on croyait gagnée par les Forces démocratiques syriennes (FDS, à dominante kurde) contre l’EI montrait là des signes dévastateurs de résurgence. Deux guerres, l’une ancienne, l’autre récente, venaient de s’entrechoquer après que Washington, qui avait soutenu militairement les FDS contre les djihadistes, avait ouvert la voie à l’armée turque et à ses supplétifs arabes en retirant ses forces de deux points de la frontière.

Trois conflits superposés

Une troisième guerre se profile encore un peu plus à l’est. Près d’un rond-point surmonté d’une statue d’Hafez Al-Assad, fondateur de l’Etat de terreur en place en Syrie et père du dictateur actuel, derrière les murs aveugles du quartier sécuritaire dont le régime ne s’est jamais départi malgré le retrait de ses forces, en 2012, du reste de Kamechliyé, Damas prépare son retour. Il s’agit peut-être de l’un des derniers épisodes de sa reconquête du territoire syrien, après en avoir perdu des pans entiers à la faveur d’une révolution désormais oubliée.

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