Le pauvre, le milliardaire et le sage

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Julien Bouissou explique dans sa chronique du « Monde » pourquoi la récompense de la Fondation Bill Gates au plan du gouvernement Modi en Inde pour « en finir avec la défécation en plein air » a choqué le Prix Nobel d’économie, Amartya Sen, pour qui la liberté et la démocratie sont des conditions essentielles au développement.

Publié aujourd’hui à 06h00 Temps de Lecture 3 min.

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Le Premier ministre indien Narendra Modi, le 15 août 2019 à Delhi en Inde.
Le Premier ministre indien Narendra Modi, le 15 août 2019 à Delhi en Inde. ADNAN ABIDI / REUTERS

Chronique. Qui, du milliardaire ou du sage, sait le mieux combattre la pauvreté ? Le premier a déjà prouvé qu’il était capable de créer de la richesse, beaucoup de richesse. Bill Gates, cofondateur de Microsoft, et son épouse Melinda sont à la tête d’une des plus grandes fortunes de la planète. ils en ont consacré une partie pour éradiquer la pauvreté et les maladies infectieuses grâce aux nouvelles technologies. Le second, Amartya Sen, Prix Nobel d’économie en 1998, a derrière lui une carrière universitaire prestigieuse au cours de laquelle il a démontré que la liberté et la démocratie étaient des conditions essentielles au développement.

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Lorsque ce dernier a appris que la Fondation Bill et Melinda Gates avait remis, fin septembre à New York, un prix au premier ministre nationaliste indien Narendra Modi pour récompenser son programme de construction de toilettes, son sang n’a fait qu’un tour. Narendra Modi a en effet éloigné l’Inde de la démocratie depuis son arrivée au pouvoir en 2014, en la faisant sombrer dans un nationalisme ethnique. « Franchement, j’étais surpris et choqué que la récompense de Gates aille à Modi », s’est lamenté le vieux professeur indien, dans un entretien au magazine américain The New Yorker. Puis il a ajouté : « je pense que le monde aime le succès, je pense que les Gates aiment le succès. Or Modi est tellement puissant qu’il est souvent perçu comme ayant, d’une certaine manière, réussi. »

Le professeur de Harvard a appris à se méfier des succès, surtout lorsqu’ils sont fulgurants et autoproclamés par les dirigeants autoritaires. Contrairement à ce que pense Bill Gates, la réduction des libertés et l’affaiblissement des institutions en cours en Inde freinent le développement. Dans son ouvrage intitulé Un nouveau modèle économique. Développement, Justice, Liberté (éd. Odile Jacob, 2003), l’économiste démontre par la théorie des « capabilités » que l’argent à lui seul ne règle pas le problème de la pauvreté. Ou que ce ne sont pas les greniers pleins qui règlent les problèmes de famines, mais plutôt leur accès. Il faut, nous dit Amartya Sen, augmenter les capacités des possibles chez les pauvres en leur donnant accès à l’éducation, à la santé, à la libre expression. Des conditions qui ne sont réunies qu’en démocratie.

Des pourcentages et beaucoup d’optimisme

Pour Bill Gates, au contraire, M. Modi est bien la preuve vivante que l’autoritarisme n’est pas un frein au développement. Le dirigeant indien a levé un tabou en organisant un vaste programme de sensibilisation aux problèmes sanitaires qui favorisent la propagation de maladies infectieuses et causent de nombreux décès chaque année.

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