A Barcelone, les indépendantistes entre démonstration de force et impuissance

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Manifestation pour l’indépendance de la Catalogne, le 11 septembre, à Barcelone.
Manifestation pour l’indépendance de la Catalogne, le 11 septembre, à Barcelone. Emilio Morenatti / AP

Ce devait être la démonstration que la force des indépendantistes catalans demeure intacte. Quelques semaines avant le verdict attendu en Espagne du procès des neuf dirigeants sécessionnistes accusés de « rébellion » pour la tentative de sécession d’octobre 2017, des centaines de milliers de personnes se sont réunies à Barcelone, comme chaque 11 septembre, jour de Diada, la fête de la Catalogne, pour demander l’indépendance. Cependant, l’essoufflement du mouvement était perceptible à la baisse du nombre de participants par rapport aux dernières années – 600 000 contre 1 million en 2018, selon la police municipale – et, surtout, à leurs discours, désabusés et critiques envers les partis sécessionnistes, ou pessimistes quant à la possibilité de voir un jour l’indépendance se matérialiser.

Sur la tribune, faute d’objectifs à court terme et de stratégie commune, les organisateurs se sont contentés d’appeler à l’unité du mouvement et de refaire l’histoire de ces dernières années, des premiers petits référendums populaires de 2009 à la déclaration d’indépendance d’octobre 2017, comme si le temps de la nostalgie était déjà venu.

« L’indépendance est possible, mais je ne sais pas si je la verrai un jour, affirme Javier Gutierrez, commerçant de 65 ans. Nous avons besoin de temps pour convaincre plus de monde. Le Brexit montre qu’une séparation sans accord n’est pas la solution. » « Les politiques ne font pas grand-chose pour obtenir l’indépendance, critique Marc Diestre, vétérinaire de 31 ans, favorable au contraire à une confrontation directe avec l’Etat. J’espère que je ne vais pas avoir à manifester vingt ans de plus. »

« L’objectif, on le voit, le chemin, plus trop »

La division entre les partis et associations indépendantistes est de plus en plus criante en Catalogne, entre les irrédentistes et les pragmatiques, ceux qui défendent une stratégie basée de nouveau sur la voie unilatérale et la confrontation et ceux qui veulent reconstruire des ponts avec le gouvernement espagnol afin d’obtenir des concessions en termes d’infrastructures ou de financement, le temps d’augmenter la base sociale de l’indépendantisme. Selon le dernier sondage du Centre d’étude catalan (CEO), paru fin juillet, 44 % des Catalans sont favorables à l’indépendance, contre 48 % qui y sont opposés.

« Il n’y a pas de marche arrière possible, veut croire Ferran Griera, ingénieur de 48 ans. C’est juste une question de temps : un jour viendra où nous serons tellement nombreux que l’on ne pourra plus nous sortir l’excuse que nous ne sommes pas assez. J’espère que le verdict du procès ouvrira les yeux des autres Catalans, pour qu’ils voient que la situation actuelle n’est pas tenable. »

« L’objectif, on le voit, mais le chemin, plus trop », avoue, penaud, Salvi H., étudiant en sciences de l’ingénieur de 23 ans qui, chaque dimanche, va chanter devant la prison de Lledoners en soutien aux dirigeants indépendantistes qui s’y trouvent en préventive.

« Nous devons penser à des mobilisations qui dérangent, à une lutte non violente qui affaiblisse les tentacules de l’Etat », explique la présidente de l’Assemblée nationale catalane (ANC), Elisenda Paluzie, qui défend la voie unilatérale. « Si, aux prochaines élections catalanes, nous obtenons plus de 50 % des votes, nous aurons un mandat pour reprendre la déclaration d’indépendance, la maintenir et résister », dit-elle, convaincue que les pragmatiques se rallieront à ses thèses « quand ils verront qu’il n’y a pas de dialogue possible avec Madrid, et que la condamnation tombera ».

L’ANC, longtemps à la fois écoutée et utilisée par les politiques indépendantistes qui comptaient sur sa capacité de mobilisation des masses, a perdu son pouvoir d’influence et se montre très critique envers les partis politiques, trop timorés et divisés par des luttes de pouvoir à son goût.

Fort pouvoir de déstabilisation

Les deux grands partis indépendantistes ont adopté des stratégies divergentes et le seul ciment qui les unit est la défense des « prisonniers politiques et des exilés ». Le parti de la Gauche républicaine catalane (ERC), qui a remporté les élections municipales en Catalogne en mai, a abandonné la voie unilatérale pour incarner la modération et le pragmatisme. Ensemble pour la Catalogne (JxC), la formation de l’actuel président catalan, l’indépendantiste radical Quim Torra, maintient, pour sa part, un discours dur, de confrontation, qui ne se concrétise cependant pas dans les faits. Il est ainsi régulièrement qualifié de « traître » par les indépendantistes les plus radicaux. Aux cris de « Sans désobéissance, pas d’indépendance ! », plusieurs centaines d’entre eux ont d’ailleurs manifesté devant le Parlement catalan.

Malgré l’impuissance des indépendantistes pour concrétiser leurs objectifs, le conflit catalan ne conserve pas moins un fort pouvoir de déstabilisation en Espagne. Une des raisons de la réticence du socialiste Pedro Sanchez à former un gouvernement de coalition avec Podemos est ainsi sa position sur la crise catalane : le parti de la gauche radicale défend un référendum d’autodétermination et qualifie les dirigeants indépendantistes incarcérés de « prisonniers politiques », remettant en cause le fonctionnement des institutions.

D’autre part, pour gouverner, Pedro Sanchez devrait aussi s’appuyer sur les députés de ERC, lesquels ont fait tomber la précédente législature en refusant de voter le budget et ont déjà expliqué que le verdict pourrait changer leur bonne disposition actuelle à le soutenir.

Coïncidence du calendrier, mercredi, les négociations entre Podemos et PSOE ont été rompues. Si aucun accord n’est scellé la semaine prochaine, le Parlement sera automatiquement dissous le 23 septembre et de nouvelles élections législatives seront convoquées le 10 novembre. Le verdict du procès des dirigeants indépendantistes pourrait alors tomber avec un gouvernement espagnol en intérim.

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