Existe-t-il un « profil type » du tueur de masse aux Etats-Unis ?

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Les tueries de masse, comme celles survenues les 3 et 4 août à El Paso (Texas) et à Dayton (Ohio), rythment l’actualité depuis longtemps aux Etats-Unis. Leur récurrence amène à s’interroger sur leurs auteurs : ont-ils des caractéristiques communes liées à leurs origines ? Quelles sont leurs motivations ? Les études montrent bien des traits communs, mais ce ne sont pas toujours les plus évidents.

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1. Ce sont à plus de 95 % des hommes

C’est la caractéristique la plus évidente parmi les tueurs de masse : il s’agit presque toujours d’hommes. Parmi les principales fusillades publiques que le site d’investigation Mother Jones a recensées depuis 1982, 111 des 115 tueurs, soit 96,5 %, sont de sexe masculin. Le FBI, qui liste les tireurs actifs depuis 2000, a répertorié 277 tireurs, dont 265 hommes pour 12 femmes, soit une prévalence masculine de 95,5 %.

2. Les Blancs ne sont pas surreprésentés

Après la fusillade d’El Paso, Donald Trump a dénoncé le « suprémacisme blanc ». Cette idéologie est à l’origine de 17 tueries ayant causé 105 morts depuis 2012 aux Etats-Unis. Mais cela signifie-t-il que les Blancs sont plus susceptibles que d’autres de commettre des meurtres de masse ? Non. Selon les analyses de ces dernières années, entre 54 % et 70 % de ces actes étaient perpétrés par des Blancs. Pourtant, ceux-ci ne sont pas surreprésentés si l’on rapporte ces chiffres à leur proportion (73,9 %) dans la population des Etats-Unis. En d’autres termes, il y a plus de tueurs blancs parce qu’il y a plus de Blancs.

Dans un article publié par Slate, l’éditorialiste Daniel Engber note que « l’affirmation sur “les Blancs sont surreprésentés parmi les tueurs de masse” sert un objectif utile en disqualifiant un autre mythe sur les tueries de masse selon lequel ils sont le fait d’immigrés dangereux (…). C’est un objectif louable, mais nous ne devrions pas avoir à bâtir d’autres mythes pour l’atteindre ».

Certaines tendances émergent tout de même. Ainsi, les tueries visant les écoles sont majoritairement commises par de jeunes blancs, selon une analyse de 111 cas par le New York Times. Les données montrent que ceux-ci ont accumulé plus d’armes à feu que toutes les autres catégories : seulement 3 % de la population étasunienne possède aujourd’hui la moitié des armes à feu du pays, selon le Injury Control Research Center de l’université Harvard. De nombreuses publications ont aussi montré que l’attachement moral et émotionnel aux armes à feu était plus fort chez les hommes (65 %) et les Blancs (78 %).

3. Les troubles mentaux ne sont pas décisifs

Donald Trump a déclaré que les tueurs d’El Paso et de Dayton étaient « des gens très, très malades mentalement ». Il est encore trop tôt pour le déterminer dans ces deux cas, mais les études portant sur les profils des tueurs de masse indiquent que les maladies mentales ne sont pas un trait si partagé.

Même si être atteint d’un trouble psychiatrique augmente en moyenne le risque d’être violent (trois à quatre fois plus), le risque absolu reste très faible et la vaste majorité des personnes atteinte ne sera jamais violente.

Les recherches menées par Michael Stone, un psychiatre de l’université Columbia, en 2015, montrent que 52 des 235 tueurs de masse qu’il a recensés souffraient de maladies mentales, soit 22 %. Une étude publiée en 2001 dans le Journal of the American Academy of Child and Adolescent Psychiatry portant sur trente-quatre adolescents a aussi conclu que seuls 23 % des tueurs souffraient de troubles psychiatriques documentés.

D’autres facteurs sont plus déterminants, selon ces travaux : 70 % des tueurs étaient décrits comme des solitaires, 61 % souffraient d’addictions à des substances diverses et 43 % avaient été victimes d’intimidations ou de harcèlement. Le professeur de psychiatrie Jeffrey Swanson rappelait toutefois, dans le média d’investigation Pro Publica, en 2014, que « les facteurs de risques des auteurs des tueries de masse sont partagés par un grand nombre de gens qui ne poseront aucun risque ».

Selon ce spécialiste, au lieu de concentrer l’attention et l’action des pouvoirs publics sur les troubles psychiatriques, il serait plus efficace de se concentrer sur les « indicateurs comportementaux ». Lors d’une étude portant sur les risques de violence parmi les gens souffrant de troubles mentaux, les chercheurs ont trouvé trois facteurs-clés : être victime très jeune de faits violents, l’abus de drogue et l’exposition à la violence dans son environnement. Sans compter les antécédents personnels : « Si quelqu’un a déjà connu des comportements violents ou agressifs, c’est un meilleur indicateur de violences futures qu’un diagnostic psychiatrique », rappelle Jeffrey Swanson.

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4. Un désir fréquent de notoriété et de revanche

Les tueurs de masse présentent souvent le profil de gens marginalisés, en rupture avec le groupe. Une partie d’entre eux ont ainsi déjà subi des humiliations ou intimidations à répétition dans leur jeunesse, dans le milieu scolaire ou familial. « Il y a pratiquement toujours un grief personnel qui orientera une personne vers des meurtres de masse », affirmait, en 2015, le docteur J. Reid Meloy, un psychologue médico-légal, au New York Times.

La recherche d’une brève notoriété locale ou nationale est souvent une motivation principale ou secondaire des tueurs de masse. C’est le cas pour les tueries ayant lieu dans de petites communautés où tout le monde se connaît. « Le tueur se perçoit comme un marginal et il existe des scénarios culturels qui lui donnent un modèle : l’idée que si vous sortez et tuez des gens, vous allez devenir un antihéros célèbre, qui fera la “une” de tous les journaux », selon Jeffrey Swanson. Christopher Harper-Mercer, qui a tué neuf personnes en octobre 2015 sur un campus universitaire, avait écrit dans un post de blog avant son action : « Il semble que plus vous tuez de personnes, plus vous êtes sous les feux de la rampe. » Dylan Klebold, qui a assassiné treize personnes au lycée de Columbine en 1999, avait affirmé dans une vidéo filmée, avant la tuerie, que « les réalisateurs de films se battront pour raconter cette histoire ».

5. Un effet de contagion avéré

La plupart des tueurs étudient les modus operandi d’autres tueurs avant de passer eux-mêmes à l’action et cherchent régulièrement à justifier leurs actes, par la diffusion d’un manifeste, qui fait souvent référence aux actions d’autres tueurs de masse, dont les idées seront largement médiatisées. « De nombreuses tueries ont tendance à se produire en groupe » à des fréquences rapprochées, écrit le Los Angeles Times. « Elles sont socialement contagieuses. »

De fait, les tueries de masse obéissent, comme tous les comportements humains, à la logique de copie sociale, c’est-à-dire au fait que nos comportements dépendent largement de ceux des autres, présents dans nos environnements immédiats (famille, amis) mais aussi dans les comportements plus lointains comme ceux d’autres tueurs dont la médiatisation de nos sociétés augmente considérablement la portée.

Dans une publication de juillet 2015 du Public Library of Science, des chercheurs des universités d’Arizona et de l’Illinois ont montré que les tueries de masse sont bel et bien contagieuses et donc sujettes… aux épidémies. Ces travaux réalisés avec des simulations mathématiques sur une base de 232 tueries de masse indiquent que chaque événement accroît un peu plus la probabilité d’une prochaine tuerie dans les treize jours suivants (chaque tuerie entraînant 0,3 nouvelle tuerie en moyenne). Les auteurs notent également qu’il n’y a « aucune preuve significative de contagion dans les tueries de masse impliquant moins de quatre morts », impliquant potentiellement que leur fréquence plus élevée réduisait l’écho médiatique et, donc, leur contagiosité.

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