L’affaire Jussie Smollett, symptôme d’une « ère victimaire » ?

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L’acteur américain noir et gay, qui avait affirmé fin janvier avoir été victime d’une agression raciste et homophobe, est soupçonné d’avoir monté l’affaire de toutes pièces et a été inculpé mercredi 20 février pour dépôt de fausse plainte.

Par Clémentine Goldszal Publié aujourd’hui à 15h48

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En mai 2017, à Londres.
En mai 2017, à Londres. Fred Duval / FilmMagicFred Duval/Film Magic/Getty Images

Début février, un fait divers indigne l’Amérique. Jussie Smollett, acteur et chanteur, star de la série Empire, vient de porter plainte à la suite d’une agression. À 2 heures, le 29 janvier, à Chicago, deux hommes cagoulés l’auraient roué de coups et couvert d’eau de javel au cri de « Ici, c’est le pays MAGA ! » (référence au slogan de campagne de Donald Trump, « Make America Great Again »).

Smollett a 36 ans, il est noir et ouvertement gay. Fils d’une militante des droits civiques amie d’Angela Davis, il est lui-même un activiste 2.0, et alimente régulièrement ses comptes Instagram et Twitter (respectivement cinq millions trois cent mille et un million trois cent mille abonnés) de posts engagés. Deux jours après l’agression, les messages de soutien abondent, et Donald Trump lui-même, interrogé sur l’affaire, la qualifie d’« horrible ».

Nouvelle dérive des « Identity Politics »

Mais très vite, la machine se grippe : Smollett refuse de confier son téléphone portable aux enquêteurs (il finira par leur fournir une version expurgée et plus ou moins inutilisable de son historique d’appels), et les policiers échouent à trouver une vidéo pour corroborer son récit. Deux semaines plus tard, deux frères nigérians, agresseurs présumés, sont arrêtés à l’aéroport de Chicago. L’un est le coach sportif de l’acteur, l’autre est apparu dans quelques épisodes, et l’on retrouve chez eux le scénario d’un épisode d’Empire.

Au cours de l’interrogatoire, ils affirment avoir été payés par Smollett pour mettre en scène l’agression, et sont relâchés deux jours plus tard. Face aux doutes qui enflaient déjà sur les réseaux sociaux et dans les médias (principalement sur Fox News, où les journalistes ont rapidement dénoncé une nouvelle dérive des « Identity Politics » [tendance des personnes partageant une identité raciale, religieuse, ethnique, sociale ou culturelle particulière à former des alliances], Smollett donne une interview exclusive, le 14 février, dans l’émission phare d’ABC, « Good Morning America ». En larmes, il fait part de son effarement face à la mise en doute de sa parole de victime. Le 20 février, il est inculpé pour dénonciation calomnieuse : la police le soupçonne d’avoir tout inventé.

Lire aussi L’acteur Jussie Smollett soupçonné d’avoir inventé l’agression raciste et homophobe dont il dit avoir été victime

Entre 2016 et 2017, les crimes de haine à l’encontre des minorités raciales, sexuelles ou religieuses ont augmenté de 17 % aux États-Unis (la troisième année de hausse d’affilée). Dans un climat social et politique tendu, et par la grâce, aussi, du mouvement #MeToo, une attention nouvelle est portée à la parole des victimes, trop souvent mise en doute, raillée ou simplement niée. Mais certains dénoncent ces avancées comme le symptôme d’une « ère victimaire » qui ferait de tout un chacun un martyr en puissance. Jussie Smollett est un artiste à succès, l’un des acteurs principaux d’une série célébrée pour son casting majoritairement africain-américain, qui met en scène une certaine idée du succès pour une communauté encore souvent reléguée, à la télévision, aux seconds rôles ou à la caricature.

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