le maigre bilan de Theresa May dans un Royaume-Uni figé par le Brexit

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La première ministre britannique, Theresa May, au Parlement de Westminster, le 22 mai 2019.
La première ministre britannique, Theresa May, au Parlement de Westminster, le 22 mai 2019. HANDOUT / REUTERS

Une première ministre fantôme au bilan squelettique : c’est l’image que renvoie aujourd’hui Theresa May, qui a fini par jeter l’éponge, le 7 juin, faute d’avoir fait accepter au Parlement britannique son « deal » sur le Brexit. Après avoir expédié les affaires courantes, la patronne du gouvernement britannique devrait quitter le 10 Downing Street en juillet, avec un héritage politique quasi inexistant. Car, outre l’échec cuisant de sa mission principale (faire sortir le Royaume-Uni de l’Union européenne), elle n’a réussi, en trois ans, à prendre quasiment aucune décision majeure.

En arrivant au pouvoir le 13 juillet 2016, au lendemain du référendum, Theresa May ne manquait pourtant pas d’ambition : elle promettait de mener à bien le Brexit, tout en mettant fin aux « injustices brûlantes » qui avaient, selon elle, servi de terreau à l’immense défiance exprimée par le peuple britannique – les inégalités rampantes frappant les plus pauvres, les minorités raciales, les femmes, les jeunes et les malades mentaux.

De nombreux chantiers d’ampleur repoussés

Mais les interminables discussions sur le Brexit avec les Vingt-Sept, ajoutées aux préparatifs du départ, ont eu raison de ses espérances, plongeant la vie politique britannique en coma artificiel. Chacun des ministres de Mme May a dû « déprioriser » les réformes en cours dans son secteur pour travailler sur les conséquences concrètes du Brexit – dont l’impact se fera sentir sur des sujets aussi variés que la pêche, la réglementation des produits chimiques ou le contrôle aérien – et adapter le droit britannique, soudain délesté du cadre européen.

Au ministère de l’économie, la mobilisation d’une bonne partie des fonctionnaires pour préparer l’éventualité d’un no-deal a torpillé les rares chantiers d’ampleur lancés par le gouvernement. Ainsi, le gigantesque plan de modernisation de l’administration fiscale a dû être repoussé, faute de moyens humains pour le mettre en œuvre. De même que la fin de l’austérité budgétaire post-crise, annoncée solennellement par Theresa May à l’automne 2018 et reportée sine die, notamment à cause du manque de fonctionnaires disponibles pour préparer les nouveaux budgets.

Le chaos du Brexit a également repoussé le plan climat du gouvernement, un texte-clé qui visait à réorienter des milliards de livres d’investissements publics vers des projets luttant contre le réchauffement climatique.

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104 lois adoptées… sur des questions mineures

Si le Brexit a occupé en trois ans plus de 500 heures de débat au Parlement, le manque de temps n’est pas le seul facteur explicatif du néant qui émerge de ces trois années. Car plus de 80 % du calendrier parlementaire a été employé par les députés à discuter d’autres sujets, aboutissant à l’adoption de 104 lois – légèrement plus que lors des trois années précédentes, où 95 lois avaient été votées.

A l’exception d’une loi antiterroriste controversée, d’une réforme de la justice et de mesures contre le blanchiment d’argent, il est difficile de trouver des textes majeurs votés pendant l’ère May. En revanche, tarifs de stationnement, parkings, pépinières, maréchaux-ferrants, voies navigables ou encore petits farceurs qui pointent des lasers sur les avions ont chacun eu droit à une loi distincte. Autant de questions mineures qui, en d’autres époques, auraient probablement eu du mal à trouver une place dans l’agenda parlementaire chargé du Royaume-Uni.

Textes peu clivants et marottes

Mais la crise politique quasi permanente entre Theresa May et le Parlement l’a conduite à se concentrer sur des textes moins clivants, et donc davantage susceptibles d’être approuvés par les députés. Quelques semaines après le psychodrame du mois de mars 2019, qui a conduit au report du Brexit, le gouvernement a ainsi relancé une vieille proposition de loi pour interdire les animaux sauvages dans les cirques itinérants (19 animaux sont concernés sur le sol britannique).

La maigreur de l’agenda intérieur du gouvernement, obnubilé par le Brexit, a également ouvert des fenêtres d’opportunités inespérées pour certaines parlementaires, qui y ont trouvé l’occasion de pousser « leurs » marottes, longtemps ignorées. C’est ainsi que la travailliste Ruth George a réussi à déposer le 27 mars une proposition de loi pour interdire les « lanternes chinoises », tenues pour responsables de nombreux incendies.

Ce mandat fantôme a aussi donné sa chance à des sujets importants, mais souvent relégués au fond de l’agenda parlementaire faute de priorisation politique, comme la pénalisation du voyeurisme de rue, la protection des victimes de harcèlement et de mutilations génitales, l’interdiction du commerce de l’ivoire ou le don d’organes.

En quittant le pouvoir, Theresa May laissera toutefois sur l’établi les rares réformes majeures qu’elle avait engagées. Il reviendra à son successeur de mettre en œuvre, ou non, l’importante baisse de la fiscalité destinée à attirer les entreprises après la sortie de l’Union européenne, la réforme de l’enseignement supérieur et l’augmentation substantielle des moyens du NHS, le système de santé britannique. Le prochain premier ministre britannique aura toutefois déjà fort à faire avec le Brexit, un dossier encore loin d’être clos.

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