Le youtubeur qui fait mal à la CDU d’Angela Merkel

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Sean Gallup/Getty Images/AFP

« Voilà, c’est l’heure d’une nouvelle vidéo ! » Casquette vissée sur ses cheveux bleus, vêtu d’un hoodie orange, Rezo – c’est son pseudo sur YouTube – prend la parole depuis ce qui ressemble à une chambre d’étudiant. A côté de lui, deux claviers électroniques, une enceinte et deux guitares. D’emblée, le jeune homme explique qu’il est DJ. Mais, aujourd’hui, c’est de la CDU, le parti de la chancelière Angela Merkel, qu’il va parler.

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« Dans cette vidéo, je vais montrer comment les gens de la CDU mentent, à quel point ils sont incompétents et comment ils font de la politique en se moquant des experts. Je vais montrer comment la CDU détruit nos vies et notre avenir. » Longue de 55 minutes, la vidéo, montée comme un clip et postée sur YouTube le 18 mai, est un réquisitoire contre la politique sociale et environnementale de l’Union chrétienne-démocrate d’Allemagne, accusée d’avoir creusé les inégalités, aggravé la précarité, et de ne rien faire de sérieux contre le réchauffement climatique depuis l’arrivée de Mme Merkel au pouvoir, en 2005. Pour autant, Rezo n’appelle pas à voter explicitement pour les Verts.

Le 23 mai, alors qu’elle a déjà été vue plus de 4 millions de fois, la présidente du parti décide de réagir. « Je me suis demandé si nous n’étions pas aussi responsables des sept (sic) plaies d’Egypte », ironise Annegret Kramp-Karrenbauer. Au siège du parti, à Berlin, Philipp Amthor, un député de 26 ans, tourne une vidéo pour répondre au youtubeur sur son terrain. Au dernier moment, la direction décide de ne pas la diffuser. Elle répondra par un texte de onze pages, justifiant ce choix par le fait que, « en des temps où les esprits s’échauffent, il est attendu de la CDU qu’elle réfléchisse et argumente en gardant la tête froide ».

Le visage d’une jeunesse

Trois jours plus tard, aux élections européennes, la CDU recueille 28,9 % des voix, son plus mauvais score depuis la guerre. Auprès des jeunes, la cote du parti, qui n’était déjà pas bien haute, s’est effondrée. Chez les moins de 30 ans, seuls 11 % ont voté CDU, 33 % pour les Verts. Dès le soir du scrutin, l’un des stratèges du parti rédige une analyse sur les causes de ce revers. Le document, qui fuite dans la presse le lendemain, évoque notamment « une série de ratés sur la façon de réagir au mouvement “Fridays for Future” et aux youtubeurs soudainement actifs en politique ».

Car Rezo n’est pas le seul à avoir sonné la charge contre la CDU. Le 24 mai, un collectif de quatre-vingt-dix youtubeurs a publié une seconde vidéo appelant à ne voter ni pour le parti de Mme Merkel ni pour ses alliés sociaux-démocrates. Rezo fait partie du groupe. Depuis, il est devenu le visage d’une jeunesse qui, par son irruption soudaine dans le débat public, fait vaciller les vieux partis qui dominaient la vie politique allemande depuis l’après-guerre et menace la coalition d’une chancelière indéboulonnable depuis quatorze ans.

Rezo aime regarder en livestream les trois conférences de presse hebdomadaires des porte-parole du gouvernement allemand, qu’il voit comme des personnages de télé-réalité.

Mais qui est ce jeune homme qui refuse de donner son vrai nom et dont la photo – consécration s’il en est – a fait la « une » du Spiegel, le 1er juin, avec ce titre : « Rezolutionnaire » ? Agé de 26 ans, il est né à Wuppertal et vit à Aix-la-Chapelle, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Titulaire d’un master d’informatique et passionné de musique, il est présent sur YouTube depuis 2015, où il publie essentiellement des tubes remixés, des chansons de lui mais aussi des vidéos humoristiques. Au fil du temps, celui dont on sait, par quelques rares confidences intimes, qu’il ne mange plus de viande depuis ses 17 ans, s’est constitué un public de fidèles. Ses deux chaînes YouTube comptaient 3,5 millions d’abonnés au 1er juin. Ses vidéos, un peu plus d’une centaine, ont été vues plus de 200 millions de fois.

Et la politique ? Dans l’entretien au Spiegel, Rezo, dont le père, la mère, deux tantes et deux oncles, et un des grands-pères sont pasteurs protestants, déclare qu’il ne se considère pas comme chrétien. Mais il ajoute qu’il ressent, « au plus profond de lui, quel genre de mec était Jésus ». Et, pour lui, pas de doute : « Je suis sûr qu’il n’aurait pas voté CDU », assure le jeune homme, qui adore regarder en livestream les trois conférences de presse hebdomadaires des porte-parole du gouvernement allemand, qu’il voit comme des personnages de télé-réalité.

« Quand Steffen Seibert [porte-parole de la chancellerie] parle, ça se sent qu’il n’a pas de réponse. Ou, alors, il a une réponse, mais il ne la dit pas. (…) De Steffen, il n’y a pas grand-chose à tirer. Parfois, j’ai l’impression qu’il est mort de l’intérieur », explique le jeune homme, dont la vidéo, le 4 juin, dix-sept jours après sa mise en ligne, avait déjà été vue plus de 14 millions de fois.

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