Le cinéma indien remporte la palme de la propagande nationaliste

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Le premier ministre indien Narendra Modi, le 30 mai à New Delhi, lors de sa cérémonie d’investiture, à laquelle s’est pressée une cohorte de sympathisants issus du cinéma.
Le premier ministre indien Narendra Modi, le 30 mai à New Delhi, lors de sa cérémonie d’investiture, à laquelle s’est pressée une cohorte de sympathisants issus du cinéma. Hindustan Times/Sipa

Il aura fallu une certaine abnégation aux acteurs, réalisateurs et producteurs indiens venus assister à l’investiture de Narendra Modi à Rashtrapati Bhavan, le palais présidentiel de New Delhi, jeudi 30 mai. Les professionnels du cinéma ouvertement à l’aise avec les thèses des nationalistes hindous ont dû rester assis plus de deux heures, placides, à regarder défiler le chef du gouvernement récemment reconduit par les urnes à un deuxième mandat, et sa kyrielle de ministres, jurant l’un après l’autre, « au nom de Dieu », qu’ils s’acquitteront « de [leur] fonction, sans jamais se laisser aller à aucun favoritisme ».

La cérémonie, aussi pompeuse qu’ennuyeuse, a surtout eu l’avantage de donner le temps aux paparazzis de traquer les VIP fans de Modi dans une foule qui approchait, dit-on, les huit mille invités. Parce qu’ils ont peur que leurs films soient coupés par la censure ou qu’ils espèrent toucher quelques subsides de l’état, les stars du cinéma indien mêlent sans vergogne politique et septième art.

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Cette année, pas moins de seize acteurs (dont la majorité pour le BJP, le parti au pouvoir) ont été élus au Parlement. Sunny Deol, par exemple, un comédien dont Modi a récemment salué « l’humilité », a remporté l’élection dans une circonscription du Pendjab sous la bannière du BJP. Habitué à enfiler le costume de personnages patriotiques et virils, ce dernier a été vu aux côtés de sa belle-mère Hema Malini, actrice tamoule réélue députée BJP dans l’Uttar Pradesh. De même ont été aperçues deux autres vedettes élues fin mai sous les mêmes couleurs, Ravi Kishan dans l’Uttar Pradesh et Manoj Tiwari, vainqueur à Delhi face à Sheila Dikshit, l’une des figures historiques de la principale formation d’opposition, le Parti du Congrès.

Séance de selfies

Autre espèce repérée par les photographes : les stars qui gravitent autour de la politique sans avoir encore fait le grand plongeon. Rajinikanth, la superstar des studios de Madras, connu pour ses virements de bord à répétition, est de celle-là. Celui qui chantait les louanges du Parti du Congrès il y a une vingtaine d’années ne jurait plus que par le BJP jusqu’à ce que l’envie le prenne de créer son propre mouvement, fin 2017. Il devait se présenter aux législatives mais y a finalement renoncé. On le soupçonne maintenant de rouler en sous-main pour Modi.

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Catégorie plus classique, les supporteurs ébaubis du premier ministre, tels les beaux gosses de la génération montante, Shahid Kapoor et Sushant Singh Rajput, ou la resplendissante Kangana Ranaut qui avait déclaré sur Instagram être « au septième ciel », le jour du triomphe électoral de Modi. Tel aussi le réalisateur Karan Johar, qui a fait campagne tout au long de l’hiver, accueillant Modi à Bombay lorsque celui-ci est venu inaugurer le nouveau Musée national du cinéma indien, ou conduisant une délégation de personnalités du cinéma à la résidence du premier ministre pour une séance de selfies qui fera beaucoup jaser…

Le monde du cinéma a « une énorme envie de participer à la vie de la nation » et entend être « une force » sur laquelle les nationalistes hindous peuvent « compter »

Karan Johar, l’une des rares célébrités à avoir révélé publiquement son homosexualité en Inde, n’a visiblement aucun mal à frayer avec un parti dont plusieurs de ses dirigeants considèrent cette orientation sexuelle comme une « maladie génétique ». D’après lui, le monde du cinéma a « une énorme envie de participer à la vie de la nation » et entend être « une force » sur laquelle les nationalistes hindous peuvent « compter ». Vu le nombre de films de propagande à l’affiche ces dernières semaines, il semble bien que le mouvement soit en marche.

Le public a notamment eu droit à The Tashkent Files, réalisé par Vivek Agnihotri, un long-métrage qui dénonce les travers dynastiques d’un parti politique ressemblant curieusement au Parti du Congrès de la famille Gandhi, et à The Accidental Prime Minister, de Vijay Gutte, l’adaptation d’un essai à charge contre l’ancien chef du gouvernement du Parti du Congrès, Manmohan Singh, interprété par Anupam Kher, l’un des invités de Modi à sa cérémonie d’investiture.

Autre acteur ayant eu droit à un carton d’invitation : Vivek Oberoi, l’interprète de PM Narendra Modi, ce biopic signé Omung Kumar, initialement programmé dans tous les cinémas à la veille des élections générales et qui n’a finalement été autorisé à sortir qu’une fois le scrutin terminé, le 24 mai.

Ce film d’une médiocrité affligeante démarre par un message fixe sur fond noir prévenant le spectateur qu’il va voir une œuvre « inspirée par notre honorable premier ministre et frère, Narendra Modi, l’un des politiciens les plus respectés d’Inde ». On frôle « la déification », avertit Raja Sen, critique à The Hindustan Times. Et ironise : « La seule raison pour laquelle Narendra Modi ne marche pas sur l’eau est qu’il en a décidé autrement. »

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